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par le choc d’une comète qui a projeté hors du soleil la six cent cinquantième partie de sa masse ; mais ce que j’ai voulu faire entendre, et ce que je maintiens encore comme hypothèse très probable, c’est qu’une comète qui, dans son périhélie, approcherait assez près du soleil pour en effleurer et sillonner la surface, pourrait produire de pareils effets, et qu’il n’est pas impossible qu’il se forme quelque jour de cette même manière des planètes nouvelles qui toutes circuleraient ensemble, comme les planètes actuelles, dans le même sens et presque dans un même plan, autour du soleil ; des planètes qui tourneraient aussi sur elles-mêmes, et dont la entière étant, au sortir du soleil, dans un état de liquéfaction, obéirait à la force centrifuge et s’élèverait à l’équateur en s’abaissant sous les pôles ; des planètes qui pourraient de même avoir des satellites en plus ou moins grand nombre, circulant autour d’elles dans le plan de leurs équateurs ; et dont les mouvements seraient semblables à ceux des satellites de nos planètes : en sorte que tous les phénomènes de ces planètes possibles et idéales seraient (je ne dis pas les mêmes), mais dans le même ordre et dans des rapports semblables à ceux des phénomènes des planètes réelles. Et pour preuve, je demande seulement que l’on considère si le mouvement de toutes les planètes, dans le même sens et presque dans le même plan, ne suppose pas une impulsion commune ? Je demande s’il y a dans l’univers quelques corps, excepté les comètes, qui aient pu communiquer ce mouvement d’impulsion ? Je demande s’il n’est pas probable qu’il tombe de temps à autres des comètes dans le soleil, puisque celle de 1680 en a, pour ainsi dire, rasé la surface ; et si par conséquent une telle comète, en sillonnant cette surface du soleil, ne communiquerait pas son mouvement d’impulsion à une certaine quantité de matière qu’elle séparerait du corps du soleil en la projetant au dehors ? Je demande si, dans ce torrent de matière projetée, il ne se formerait pas des globes par l’attraction mutuelle des parties, et si ces globes ne se trouveraient pas à des distances différentes, suivant la différente densité des matières, et si les plus légères ne seraient pas poussées plus loin que les plus denses par la même impulsion ? Je demande si la situation de tous ces globes presque dans le même plan n’indique pas assez que le torrent projeté n’était pas d’une largeur considérable, et qu’il n’avait pour cause qu’une seule impulsion, puisque toutes les parties de la matière dont il était composé ne se sont éloignées que très peu de la direction commune ? Je demande comment et où la matière de la terre et des planètes aurait pu se liquéfier si elle n’eût pas résidé dans le corps même du soleil, et si l’on peut trouver une cause de cette chaleur et de cet embrasement du soleil autre que celle de sa charge et du frottement intérieur produit par l’action de tous ces vastes corps qui circulent autour de lui ? Enfin je demande qu’on examine tous les rapports, que l’on suive toutes les vues, que l’on compare toutes les analogies sur lesquelles j’ai fondé mes raison-