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nant que le froid soit beaucoup plus grand, et que les glaces occupent une bien plus vaste étendue dans ces régions australes que dans les boréales.

Et comme ces glaces ne feront qu’augmenter par le refroidissement successif de la terre, il sera dorénavant plus inutile et plus téméraire qu’il ne l’était ci-devant, de chercher à faire des découvertes au delà du 80e degré vers le pôle boréal, et au delà du 55e vers le pôle austral. La Nouvelle-Zélande, la pointe de la Nouvelle-Hollande et celles des terres Magellaniques, doivent être regardées comme les seules et dernières terres habitables dans cet hémisphère austral.

J’ai fait représenter toutes les îles et plaines de glaces reconnues par les différents navigateurs, et notamment par les capitaines Cook et Furneaux, en suivant les points de longitude et de latitude indiqués dans leurs cartes de navigation ; toutes ces reconnaissances des mers australes ont été faites dans les mois de novembre, décembre, janvier et février, c’est-à-dire dans la saison d’été de cet hémisphère austral : car quoique ces glaces ne soient pas toutes permanentes, et qu’elles voyagent selon qu’elles sont entraînées par les courants ou poussées par les vents, il est néanmoins presque certain que, comme elles ont été vues dans cette saison d’été, elles s’y trouveraient de même et en bien plus grande quantité dans les autres saisons, et par conséquent on doit les regarder comme permanentes, quoiqu’elles ne soient stationnaires aux mêmes points.

Au reste, il est indifférent qu’il y ait des terres ou non dans cette vaste région australe, puisqu’elle est entièrement couverte de glaces depuis le 60e degré de latitude jusqu’au pôle, et l’on peut concevoir aisément que toutes les vapeurs aqueuses qui forment les brumes et les neiges se convertissant en glaces, elles se gèlent et s’accumulent sur la surface de la mer comme sur celle de la terre. Rien ne peut donc s’opposer à la formation ni même à l’augmentation successive de ces glacières polaires, et, au contraire, tout s’oppose à l’idée qu’on avait ci-devant de pouvoir arriver à l’un ou à l’autre pôle par une mer ouverte ou par des terres praticables.

Toute la partie des côtes du pôle boréal a été réduite et figurée d’après les cartes les plus étendues, les plus nouvelles et les plus estimées. Le nord de l’Asie depuis la Nouvelle-Zemble et Archangel au cap Szalaginski, la côte des Tschutschis et du Kamtschatka, ainsi que les îles Aleutes, ont été réduites sur la grande carte de l’empire de Russie, publiée l’année dernière, 1777. Les îles aux Renards[1] ont été relevées sur la carte manuscrite de

  1. Il est aussi fait mention de ces îles aux Renards, dans un voyage fait en 1776 par les Russes, sous la conduite de M. Solowiew : il nomme Unataschka l’une de ces îles, et dit qu’elle est à dix-huit cents werstes de Kamtschatka, et qu’elle est longue d’environ deux cents werstes ; la seconde de ces îles s’appelle Umnack, elle est longue d’environ cent cinquante werstes ; une troisième, Akuten, a environ quatre-vingt werstes de longueur ; enfin, une quatrième, qui s’appelle Radjack ou Kadjak, est la plus voisine de l’Amérique. Ces quatre îles sont accompagnées de quatre autres îles plus petites ; ce voyageur dit aussi