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reste de ces affaissements dans les terres du midi est celle de la perte de la Taprobane, dont on croit que les Maldives et les Laquedives ont fait autrefois partie. Ces îles, ainsi que les écueils et les bancs qui règnent depuis Madagascar jusqu’à la pointe de l’Inde, semblent indiquer les sommets des terres qui réunissaient l’Afrique avec l’Asie, car ces îles ont presque toutes, du côté du nord, des terres et des bancs qui se prolongent très loin sous les eaux.

Il paraît aussi que les îles de Madagascar et de Ceylan étaient autrefois unies aux continents qui les avoisinent. Ces séparations et ces grands bouleversements dans les mers du midi ont la plupart été produits par l’affaissement des cavernes, par les tremblements de terre et par l’explosion des feux souterrains ; mais il y a eu aussi beaucoup de terres envahies par le mouvement lent et successif de la mer d’orient en occident : les endroits du monde où cet effet est le plus sensible sont les régions du Japon, de la Chine et de toutes les parties orientales de l’Asie. Ces mers, situées à l’occident de la Chine et du Japon, ne sont pour ainsi dire qu’accidentelles et peut-être encore plus récentes que notre Méditerranée.

Les îles de la Sonde, les Moluques et les Philippines ne présentent que des terres bouleversées, et sont encore pleines de volcans ; il y en a beaucoup aussi dans les îles du Japon, et l’on prétend que c’est l’endroit de l’univers le plus sujet aux tremblements de terre ; on y trouve quantité de fontaines d’eau chaude. La plupart des autres îles de l’océan Indien ne nous offrent aussi que des pics ou des sommets de montagnes isolées qui vomissent le feu. L’île de France et l’île de Bourbon paraissent deux de ces sommets, presque entièrement couverts de matières rejetées par les volcans ; ces deux îles étaient inhabitées lorsqu’on en a fait la découverte.


(29) Page 114, ligne 40. À la Guyane, les fleuves sont si voisins les uns des autres, et en même temps si gonflés, si rapides dans la saison des pluies, qu’ils entraînent des limons immenses qui se déposent sur toutes les terres basses et sur le fond de la mer en sédiments vaseux. Les côtes de la Guiane française sont si basses que ce sont plutôt des grèves toutes couvertes de vase en pente très douce, qui commence dans les terres et s’étend sur le fond de la mer à une très grande distance. Les gros navires ne peuvent approcher de la rivière de Cayenne sans toucher, et les vaisseaux de guerre sont obligés de rester à deux lieues en mer. Ces vases en pente douce s’étendent tout le long des rivages, de Cayenne jusqu’à la rivière des Amazones : l’on ne trouve dans cette grande étendue que de la vase et point de sable, et tous les bords de la mer sont couverts de palétuviers ; mais à sept ou huit lieues au-dessus de Cayenne, du côté du nord-ouest jusqu’au fleuve Marony, on trouve quelques anses dont le fond est de sable et de rochers qui forment des brisants : la vase cependant les recouvre pour la plupart, aussi bien que les couches de sable, et cette vase a d’autant plus d’épaisseur qu’elle s’éloigne davantage du bord de la mer : les petits rochers n’empêchent pas que ce terrain ne soit en pente très douce à plusieurs lieues d’étendue dans les terres. Cette partie de la Guiane, qui est au nord-ouest de Cayenne, est une contrée plus élevée que celles qui sont au sud-est : on en a une preuve démonstrative, car tout le long des bords de la mer on trouve de grandes savanes noyées qui bordent la côte, et dont la plupart sont desséchées dans la parties du nord-ouest, tandis qu’elles sont couvertes des eaux de la mer dans les parties du sud-est. Outre ces terrains noyés actuellement par la mer, il y en a d’autres plus éloignés, et qui de même étaient noyés autrefois : on trouve aussi en quelques endroits des savanes d’eau douce, mais celles-ci ne produisent point de palétuviers, et seulement beaucoup de palmiers lataniers ; on ne trouve pas une seule pierre sur toutes ces côtes basses ; la marée ne laisse pas d’y monter de sept à huit pieds de hauteur, quoique les courants lui soient opposés, car ils sont tous dirigés vers les îles Antilles. La marée est fort sensible lorsque