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se sécher et arriver enfin à l’état de repos et de tranquillité où l’homme pouvait être le témoin intelligent, l’admirateur paisible du grand spectacle de la nature et des merveilles de la création. Ainsi, nous sommes persuadés, indépendamment de l’autorité des livres sacrés, que l’homme a été créé le dernier, et qu’il n’est venu prendre le sceptre de la terre que quand elle s’est trouvée digne de son empire. Il paraît néanmoins que son premier séjour a d’abord été, comme celui des animaux terrestres, dans les hautes terres de l’Asie, que c’est dans ces mêmes terres où sont nés les arts de première nécessité, et bientôt après les sciences, également nécessaires à l’exercice de la puissance de l’homme, et sans lesquelles il n’aurait pu former de société, ni compter sa vie, ni commander aux animaux, ni se servir autrement des végétaux que pour les brouter. Mais nous nous réservons d’exposer dans notre dernière époque les principaux faits qui ont rapport à l’histoire des premiers hommes.




SIXIÈME ÉPOQUE

LORSQUE S’EST FAITE LA SÉPARATION DES CONTINENTS.

Le temps de la séparation des continents[NdÉ 1] est certainement postérieur au temps où les éléphants habitaient les terres du nord, puisque alors leur espèce était également subsistante en Amérique, en Europe et en Asie. Cela nous est démontré par les monuments, qui sont les dépouilles de ces animaux trouvées dans les parties septentrionales du nouveau continent, comme dans celles de l’ancien. Mais comment est-il arrivé que cette séparation des continents paraisse s’être faite en deux endroits, par deux bandes de mer qui s’étendent depuis les contrées septentrionales, toujours en s’élargissant, jusqu’aux contrées les plus méridionales ? Pourquoi ces bandes de mer ne se trouvent-elles pas, au contraire, presque parallèles à l’équateur, puisque le mouvement général des mers se fait d’orient en occident ? N’est-ce pas une nouvelle preuve que les eaux sont primitivement venues des pôles, et qu’elles n’ont gagné les parties de l’équateur que successivement ? Tant qu’a duré la chute des eaux, et jusqu’à l’entière dépuration de l’atmosphère, leur mouve-

  1. Buffon, désigne ainsi l’époque pendant laquelle les continents ont pris la forme qu’ils présentent aujourd’hui. Les connaissances très rudimentaires que l’on avait à cette époque sur la constitution géologique du globe et la distribution des fossiles dans les divers points de sa surface ne permettaient que des hypothèses presque sans fondement. On ne doit donc attacher qu’une faible importance à tout ce chapitre. Buffon y fait cependant preuve, dans plus d’un passage, d’une grande sagacité.