Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome I, partie 2.pdf/370

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en appartient 29/30 à la terre. Ainsi la chaleur du fer rouge, qui a été trouvée vingt-quatre fois plus grande que ces deux chaleurs prises ensemble, doit être augmentée de 1/30 dans la même raison qu’elle est aussi diminuée, et cette augmentation est par conséquent de 24/30 ou de 4/5. Nous devons donc estimer à très peu près 25 la chaleur du fer rouge, relativement à la chaleur propre et actuelle du globe terrestre qui nous sert d’unité. On peut donc dire que, dans le temps de l’incandescence, il était vingt-cinq fois plus chaud qu’il ne l’est aujourd’hui ; car nous devons regarder la chaleur du soleil comme une quantité constante, ou qui n’a que très peu varié depuis la formation des planètes. Ainsi la chaleur actuelle du globe étant à celle de son état d’incandescence : : 1 : 25, et la diminution de cette chaleur s’étant faite en même raison que la succession du temps, dont l’écoulement total depuis l’incandescence est de 74 047 ans, nous trouverons, en divisant 74 047 par 25, que tous les 2 962 ans environ, cette première chaleur du globe a diminué de 1/25 ; et qu’elle continuera de diminuer de même jusqu’à ce qu’elle soit entièrement dissipée ; en sorte qu’ayant été 25 il y a 74 047 ans, et se trouvant aujourd’hui 25/25 ou 1, elle sera dans 74 047 autres années 1/25 de ce qu’elle est actuellement.

Mais cette compensation par la chaleur du soleil étant 1/50 aujourd’hui, était vingt-cinq fois plus petite dans le temps que la chaleur du globe était vingt-cinq fois plus grande : multipliant donc 1/50 par 1/25, la compensation dans l’état d’incandescence n’était que de 1/1250. Et comme la chaleur primitive du globe a diminué de 1/25, tous les 2 962 ans, on doit en conclure que, dans les derniers 2 962 ans, la compensation étant 1/50, et dans les premiers 2 962 ans étant 1/1250, dont la somme est 26/1250, la compensation des temps suivants et antécédents, c’est-à-dire pendant les 2 962 ans précédant les derniers, et pendant les 2 962 suivant les premiers, a toujours été égale à 26/1250. D’où il résulte que la compensation totale pendant les 74 047 ans, est 26/1250 multipliés par 12 1/2, moitié de la somme de tous les termes de 2 962 ans, ce qui donne 325/1250 ou 13/50. C’est là toute la compensation que la chaleur du soleil a faite à la perte de la chaleur propre du globe terrestre ; cette perte depuis le commencement jusqu’à la fin des 74 047 ans étant 25, elle est à la compensation totale, comme le temps total de la période est au temps du prolongement du refroidissement pendant cette période de 74 047. On aura donc 25 : 13/50 : : 74 047 : 70 ans environ. Ainsi au lieu de 74 047 ans, on doit dire qu’il y a 74 817 ans que la terre a commencé de recevoir la chaleur du soleil et de perdre la sienne.

Le feu du soleil, qui nous paraît si considérable, n’ayant compensé la perte de la chaleur propre de notre globe que de 13/50 sur 25, depuis le premier temps de sa formation, l’on voit évidemment que la compensation qu’a pu produire la chaleur envoyée par la lune et par les autres planètes à la terre est si petite, qu’on pourrait la négliger sans craindre de se tromper de plus de dix ans sur le prolongement des 74 817 ans qui se sont écoulés pour le refroidissement de la terre à la température actuelle. Mais comme dans un sujet de cette espèce on peut désirer que tout soit démontré, nous ferons la recherche de la compensation qu’a pu produire la chaleur de la lune à la perte de la chaleur du globe de la terre.

La lune se serait refroidie au point de pouvoir en toucher la surface en 6 492 ans, et au point de la température actuelle de la terre en 14 176 ans, en supposant que la terre se fût elle-même refroidie à ce point en 74 047 ans ; mais comme elle ne s’est réellement refroidie à la température actuelle qu’en 74 817 ans environ, la lune n’a pu se refroidir de même qu’en 14 323 ans environ, en supposant encore que rien n’eût compensé la perte de sa chaleur propre. Ainsi sa chaleur était, à la fin de cette période de 14 323 ans, vingt-cinq fois plus petite que dans le temps de l’incandescence, et l’on aura, en divisant 14 323 par 25 533 ans environ ; en sorte que tous les 533 ans, cette première chaleur de la lune a diminué de 1/25, et qu’étant d’abord 25, elle s’est trouvée 25/25 ou 1 au bout de 14 323 ans, et de 1/25 au bout de 14 323 autres années ; d’où l’on peut conclure que la lune, après 28 646 ans,