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tainement l’ouvrage des volcans… ; je les trouvai de même nature que ces dernières ; ainsi je ne doutai point que ces pierres de Montferrier ne fussent elles-mêmes une lave très dure ou une matière fondue par un volcan, éteint depuis un temps immémorial. Toute la montagne de Montferrier est parsemée de ces pierres ou laves ; le village en est bâti en partie, et les rues en sont pavées… Ces pierres présentent pour la plupart, à leur surface, de petits trous ou de petites porosités qui annoncent bien qu’elles sont formées d’une matière fondue par un volcan ; on trouve cette lave répandue dans toutes les terres qui avoisinent Montferrier…

» Du côté de Pézenas, les volcans éteints sont en grand nombre… ; toute la contrée en est remplie, principalement depuis le cap d’Agde, qui est lui-même un volcan éteint, jusqu’au pied de la masse des montagnes qui commencent à 5 lieues au nord de cette côte, et sur le penchant ou à peu de distance desquelles sont situés les villages de Livran, Peret, Fontès, Néfiez, Gabian, Faugères. On trouve, en allant du midi au nord, une espèce de cordon ou de chapelet fort remarquable, qui commence au cap d’Agde, et qui comprend les monts de Saint-Thibéry et le Causse (montagnes situées au milieu des plaines de Bressan), le pic de la tour de Valros, dans le territoire de ce village, le pic de Montredon au territoire de Tourbes, et celui de Sainte-Marthe, auprès du prieuré royal de Cassan, dans le territoire de Gabian ; il part encore du pied de la montagne, à la hauteur du village de Fontès, une longue et large masse qui finit au midi auprès de la grange de Prés… et qui est terminée, dans la direction du levant au couchant, entre le village de Caus et celui de Nizas… Ce canton a cela de remarquable qu’il n’est presque qu’une masse de lave, et qu’on observe au milieu une bouche ronde d’environ 200 toises de diamètre, aussi reconnaissable qu’il soit possible, qui a formé un étang qu’on a depuis desséché, au moyen d’une profonde saignée faite entièrement dans une lave dure et formée par couches, ou plutôt par ondes immédiatement contiguës…

» On trouve, dans tous ces endroits, de la lave et des pierres ponces ; presque toute la ville de Pézenas est pavée de lave ; le rocher d’Agde n’est que de la lave très dure, et toute cette ville est bâtie et pavée de cette lave, qui est très noire… Presque tout le territoire de Gabian, où l’on voit la fameuse fontaine de pétrole, est parsemé de laves et de pierres ponces.

» On trouve aussi au Causse de Basan et de Saint-Thibéry une quantité considérable de basaltes…, qui sont ordinairement des prismes à six faces, de 10 à 14 pieds de long… Ces basaltes se trouvent dans un endroit où les vestiges d’un ancien volcan sont on ne peut pas plus reconnaissables.

» Les bains de Balaruc… nous offrent partout des débris d’un volcan éteint ; les pierres qu’on y rencontre ne sont que des pierres ponces de différentes grosseurs…

» Dans tous les volcans que j’ai examinés, j’ai remarqué que la matière ou les pierres qu’ils ont vomies sont sous différentes formes : les unes sont en masse contiguë, très dures et pesantes, comme le rocher d’Agde ; d’autres, comme celles de Montferrier et la lave de Tourbes, ne sont point en masses, ce sont des pierres détachées, d’une pesanteur et d’une dureté considérables[1]. »

M. Villet, de l’Académie de Marseille, m’a envoyé, pour le Cabinet du Roi, quelques échantillons de laves et d’autres matières trouvées dans les volcans éteints de Provence, et il m’écrit qu’à une lieue de Toulon on voit évidemment les vestiges d’un ancien volcan, et qu’étant descendu dans une ravine au pied de cet ancien volcan de la montagne d’Ollioules, il fut frappé, à l’aspect d’un rocher détaché du haut, de voir qu’il était calciné ; qu’après en avoir brisé quelques morceaux, il trouva dans l’intérieur des parties

  1. Mémoires de l’Académie des sciences, année 1760, p. 466 jusqu’à 473.