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fait équilibre à la force centrifuge. M. Roche a fait voir, par la discussion de ses surfaces de niveau, que la portion de la nébuleuse devenue libre ne vient pas seulement de l’équateur, mais d’une nappe superficielle qui s’étend beaucoup plus loin vers les deux pôles et qui se met à couler vers l’ouverture équatoriale. Or certaines parties y arrivent avec une vitesse insuffisante pour circuler extérieurement ; elles rentrent dès lors dans la nébulosité en décrivant des ellipses dont l’aphélie est précisément à la limite équatoriale. Une fois cette notion admise, et elle ne peut l’être pleinement que si l’on tient compte de la rareté excessive de la nébuleuse solaire dans les régions considérées, M. Roche admet que, en vertu de la résistance du milieu, une partie de ces matériaux finissent par tomber sur le soleil en lui restituant quelque chaleur, mais que d’autres n’éprouvent pas cet effet et perdent seulement, par leurs réactions mutuelles, leurs vitesses radiales, en conservant à peu près leurs vitesses tangentielles.

» Cette idée d’anneaux intérieurs rendus libres à leur tour par la contraction progressive de l’atmosphère génératrice donne à M. Roche l’explication de l’existence d’une partie des anneaux de Saturne dans une région où, d’après une autre loi qui lui est due, aucun satellite de même densité que la planète n’aurait pu se former.

» Bornons-nous à indiquer ici les notions originales introduites dans cette belle théorie par M. Roche.

» Égalité de durée, à l’origine, entre la rotation et la révolution de chaque masse planétaire.

» Impossibilité de la formation de satellites quelconques pendant toute la période où l’action solaire a pu maintenir cette égalité.

» Possibilité de la formation d’un ou de plusieurs satellites à partir de l’époque où le rétrécissement de la surface limite de l’atmosphère de la planète a réduit la force dirigeante de l’astre central.

» Formation d’anneaux intérieurs, à la surface limite, entièrement liée à celle des anneaux extérieurs considérés par Laplace.

» Condition pour qu’une planète ou une masse fluide puisse conserver sa figure d’équilibre, malgré l’attraction du corps central. (La distance ne doit pas tomber au-dessous des cinq quarts du quotient du diamètre de ce dernier divisé par la racine cubique de la densité du satellite.)

» Ces notions nouvelles complètent, j’ose le dire, la conception de Laplace ; elles lui permettent de s’étendre jusqu’aux détails, au moyen d’une discussion analytique assez simple pour ne dérouter aucun lecteur. »

Des phases primitives d’une révolution semblable à celle que Laplace assigne à notre système solaire nous sont offertes par les nébuleuses actuelles. Quelques-unes de ces immenses masses vaporeuses ont une densité à peu près uniforme dans toutes leurs parties ; elles représentent la première phase d’évolution de notre système solaire ; d’autres sont manifestement en