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Tandis qu’il augmentait la surface du Jardin du Roi par des achats de terrain et d’immeubles, abandonnant même son logement pour faire place aux collections, il se mettait en relation avec tous les hommes qu’il jugeait aptes à lui fournir des matériaux pour l’enrichissement des galeries. Ne pouvant pas payer tous les objets qui lui étaient envoyés, il s’ingéniait à récompenser d’une autre façon le zèle des donateurs. Peu de temps après

    comprenant les différentes pensions qui y furent successivement jointes, montaient à 32 280 livres. On en trouve le détail dans un livre de recettes déjà cité, qui était tenu par Buffon lui-même, écrit en entier de sa main, et dont la régularité parfaite témoigne du soin qu’il apportait dans le règlement de ses affaires et dans l’administration de sa fortune. À la page 6, au chapitre Appointements, se trouvent les articles suivants :

    » Les appointements de ma place d’Intendant du Jardin et Cabinet du Roi sont de six mille livres et se payent par six mois chez M. Matagon, premier commis de MM. les administrateurs des domaines et bois de Paris.

    » Il m’a été accordé par le Roi, après trente-cinq ans de service, une somme de trois mille livres en supplément de mes appointements, par une ordonnance sur le trésor royal, dont il faut tous les ans solliciter l’expédition.

    » Il m’a été accordé par le Roi une pension de six mille livres, dont quatre mille sont réversibles à mon fils, et qui me sont payées au trésor royal.

    » J’ai une pension, en qualité de trésorier de l’Académie des sciences, de trois mille livres par an.

    » Le Roi a eu la bonté de m’accorder sur sa cassette une pension de huit cents livres par an, laquelle se paye d’avance et par quartiers de deux cents livres chacun.

    » Le Roi m’a accordé une gratification annuelle de quatre mille livres sur la caisse du commerce, et qui se paye chez M. de L’Étang, par six mois, sur ma simple quittance.

    » Il m’est dû, sous le nom de mon fils, en qualité de gouverneur de Montbard, une rente viagère de quatre cent quatre-vingts livres par an, qui se payent par trimestre. »

    La fortune particulière de Buffon représentait un revenu annuel de quatre-vingt mille livres, dont, en puisant à la source que j’ai indiquée plus haut, on peut établir ainsi le détail :

    1o Les forges, louées par an, dans les derniers temps de la vie de Buffon, trente-cinq mille livres ;

    2o Les bois de Buffon et de la Mairie, dont le revenu était conservé ; d’autres bois, situés sur la terre de Montbard, servant à l’alimentation des forges, rapportaient vingt mille livres de revenu ;

    3o La seigneurie de Buffon avec ses fonds patrimoniaux et ses droits de cens, sept mille livres ;

    4o La terre de Montbard, dix-huit mille livres.

    À ces revenus, il faut ajouter les produits de l’Histoire naturelle, dont les derniers volumes furent payés par Panckoucke douze mille livres le volume. Quant aux spéculations, Buffon n’en fit jamais. Je me trompe ; une fois, une seule, entraîné par M. de La Chapelle, commissaire général de la maison du Roi, son ami, et dans la prudence duquel il avait toute confiance, il plaça une somme de trente mille livres dans une entreprise industrielle, la Compagnie formée à Paris par M. Leschevin pour l’épurement du charbon de terre, et encouragée par Turgot et Necker ; il les perdit.

    Pour donner une idée de l’attention avec laquelle il notait toute chose et du soin qu’il apportait dans le recouvrement de son revenu, parmi les nombreuses pages du livre que j’ai cité et dont l’original appartient à M. Nadault de Buffon, je prendrai deux articles au hasard. Au chapitre des droits seigneuriaux sur la terre de Buffon se trouve, à la page 7, la mention suivante : « Il m’est dû pour la location de la halle de Buffon ce que le R. P. Ignace Bougot peut en tirer, savoir quatre livres du sieur Tribolet, et plus ou moins des marchands qui viennent y étaler. » À la page 8 : « Il m’est dû pour la permission du jeu de quilles trois livres par an, que le R. P. Ignace reçoit pour moi. »