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vit les cellules se comporter de la même façon, se multiplier et se transformer par les mêmes procédés.

La botanique mit chaque jour en relief l’analogie de la structure des végétaux avec celle des animaux qu’étudiait la zoologie ; tandis que la physiologie établissait l’identité des fonctions non seulement chez tous les animaux, mais aussi chez les végétaux. Toutes ces sciences permettaient de suivre l’évolution graduelle des formes, des structures, des fonctions, depuis la masse vivante la plus simple jusqu’aux êtres les plus élevés en organisation ; elles montraient que s’il n’est pas toujours aisé de trouver des formes transitoires entre les organismes adultes, il est toujours possible d’indiquer l’origine de ces organismes ; elles firent voir que si Bonnet s’était trompé en imaginant une échelle unique des êtres, Buffon avait eu raison en adoptant une évolution en quelque sorte rayonnante et arborescente ; et les savants luttent encore à qui établira l’arbre généalogique des êtres vivants conforme aux liens de parenté qui les rattachent les uns aux autres et qui ne peuvent plus être niés par personne.

L’unité de plan de Buffon, l’unité de composition de Geoffroy Saint-Hilaire étaient ainsi mis hors de doute par toutes les découvertes de la science moderne et le mot de Buffon « tous les êtres de l’univers ne forment qu’une seule famille » devenait une vérité aussi banale, un axiome aussi incontestable que le un et un font deux des géomètres.

Une autre question restait à résoudre. Il importait de déterminer les causes déterminantes des transformations, de l’évolution ascendante ou descendante des êtres vivants.

Les causes des transformations des êtres vivants. Buffon avait indiqué comme cause de ces transformations le milieu ambiant, le climat, la nourriture, etc., mais il n’avait même pas cherché à expliquer comment agissaient ces conditions, par quels procédés elles opéraient les transformations qu’il mettait sur leur compte. Le rôle de Lamarck avait été de chercher ces explications. Il avait cru les trouver dans les besoins nouveaux provoqués par des conditions nouvelles, entraînant des habitudes nouvelles et par suite provoquant le développement ou l’atrophie et la transformation d’organes anciens, ou bien l’apparition d’organes nouveaux. En un mot, il émettait cette idée, fort juste en elle-même, vérifiée depuis par mille faits, que la fonction crée l’organe, la fonction étant elle-même créée par le besoin, et le besoin déterminé par le milieu. La théorie de Lamarck n’avait qu’un tort, elle avait été formulée trop tôt, à une époque où les faits sur lesquels elle aurait dû être étayée n’étaient pas encore suffisamment connus. Sur le moment on n’y prêta pas grande attention, puis on l’oublia, involontairement d’abord, volontairement ensuite. Darwin put tout à son aise parler des organes développés par l’usage ou atrophiés par le défaut d’usage, sans que personne parût se douter qu’en termes différents, il ressuscitait la doctrine de Lamarck : « la fonction transforme ou produit l’organe »,