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» Dans les végétaux, où il n’y a pas d’actions, et par conséquent point d’habitudes proprement dites, de grands changements de circonstances n’en amènent pas moins de grandes différences dans les développements de leurs parties, en sorte que ces différences font naître et développer certaines d’entre elles, tandis qu’elles atténuent et font disparaître plusieurs autres. Mais ici tout s’opère par les changements survenus dans la nutrition du végétal, dans ses absorptions et ses transpirations, dans la quantité de calorique, de lumière, d’air et d’humidité qu’il reçoit alors habituellement ; enfin dans la supériorité que certains des divers mouvements vitaux prennent sur les autres. »

Lamarck résume ensuite les conséquences des habitudes dans les deux lois suivantes :

« 1o Dans tout animal qui n’a point dépassé le terme de ses développements, l’emploi plus fréquent et soutenu d’un organe, le développe, l’agrandit, et lui donne une puissance proportionnée à la durée de cet emploi. Tandis que le défaut constant d’usage de tel organe l’affaiblit insensiblement et le détériore, diminue progressivement ses facultés et finit par le faire disparaître ;

» 2o Tout ce que la nature a fait acquérir ou perdre aux individus par l’influence des circonstances où leur vie se trouve depuis longtemps exposée, et par conséquent par l’influence de l’emploi prédominant de tel organe ou par celle d’un défaut constant d’usage de telle partie, elle le conserve par la génération aux nouveaux individus qui en proviennent, pourvu que les changements acquis soient communs aux deux sexes qui ont produit ces nouveaux individus. »

En résumé, pour Lamarck, le point de départ de toute variation individuelle se trouve dans l’action des conditions extérieures qui, en créant à l’individu des besoins nouveaux, entraîne la production d’habitudes nouvelles ; celles-ci, à leur tour, déterminent le développement ou même la formation de certaines parties, tandis que d’autres, non utilisées, peuvent disparaître.

L’hérédité perpétue ensuite les qualités acquises, et celles-ci prennent un développement d’autant plus considérable, que l’espèce envisagée se trouve soumise pendant plus longtemps aux mêmes circonstances.

Je ne veux pas discuter l’opinion de Lamarck. Les développements dans lesquels je serai bientôt obligé de rentrer relativement à la question de la transformation des espèces suffiront pour mettre en lumière ce qu’il y a d’inexact ou d’erroné dans sa théorie.

Progrès de la théorie du transformisme. À partir du milieu du xviiie siècle il se fait un mouvement scientifique considérable à la production duquel contribuent Buffon, Réaumur, Adanson, Lamarck, en France ; Oken, Treviranus, en Allemagne ; Bonnet, en Suisse ; Spallanzani en Italie, etc. L’anatomie comparée à laquelle Daubenton avait fait faire les premiers pas dans l’Histoire naturelle remplace l’étude