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» En effet, en considérant d’abord l’organisation animale la plus simple, pour s’élever ensuite graduellement jusqu’à celle qui est la plus composée, comme depuis la monade qui, pour ainsi dire, n’est qu’un point animé, jusqu’aux animaux à mamelles, et parmi eux jusqu’à l’homme, il y a évidemment une gradation nuancée dans la composition de l’organisation de tous les animaux et dans la nature de ses résultats, qu’on ne saurait trop admirer et qu’on doit s’efforcer d’étudier, de déterminer et de bien connaître.

» De même, parmi les végétaux, depuis les byssus pulvérulents, depuis la simple moisissure jusqu’à la plante dont l’organisation est la plus composée, la plus féconde en organes de tout genre, il y a évidemment une gradation nuancée en quelque sorte analogue à celle qu’on remarque dans les animaux.

» Par cette gradation nuancée dans la complication de l’organisation, je n’entends point parler de l’existence d’une série linéaire, régulière dans les intervalles des espèces et des genres : une pareille série n’existe pas ; mais je parle d’une série presque régulièrement graduée dans les masses principales, telles que les grandes familles ; série bien assurément existante, soit parmi les animaux, soit parmi les végétaux ; mais qui dans la considération des genres et surtout des espèces, forme en beaucoup d’endroits des ramifications latérales, dont les extrémités offrent des points véritablement isolés.

» S’il existe parmi les êtres vivants une série graduée au moins dans les masses principales, relativement à la complication ou à la simplification de l’organisation, il est évident que dans une distribution bien naturelle, soit des animaux, soit des végétaux, on doit nécessairement placer aux deux extrémités de l’ordre les êtres les plus dissemblables, les plus éloignés sous la considération des rapports, et par conséquent ceux qui forment les termes extrêmes que l’organisation, soit animale, soit végétale, peut présenter.

» Toute distribution qui s’éloigne de ce principe me paraît fautive ; car elle ne peut pas être conforme à la marche de la nature.

» Cette considération importante nous mettra donc dans le cas de mieux connaître la nature des êtres dont nous devons nous occuper dans ce Cours ; de juger plus justement de leurs rapports avec les autres êtres qui existent ; enfin de déterminer plus convenablement le rang que chacun d’eux doit occuper dans la série générale des êtres vivants, et particulièrement dans celle des animaux connus.

» Vous verrez que les polypes qui forment la dernière classe des animaux sans vertèbres et par conséquent de tout le règne animal, et que ceux surtout que comprend le dernier ordre de cette classe, n’offrent en quelque sorte que des ébauches de l’animalité ; enfin vous serez convaincus que les polypes sont à l’égard des autres animaux, ce que les plantes cryptogames sont aux végétaux des autres classes.

» Cette gradation soutenue dans la simplification ou dans la complication