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leur, qui devient seulement un peu plus claire ou plus foncée dans les différentes saisons de l’année ; ceux, au contraire, qui vivent sous des climats différents sont de couleurs différentes, et les animaux domestiques varient prodigieusement par les couleurs, en sorte qu’il y a des chevaux, des chiens, etc., de toute sorte de poils, au lieu que les cerfs, les lièvres, etc., sont tous de la même couleur : les injures du climat toujours les mêmes, la nourriture toujours la même, produisent dans les animaux sauvages cette uniformité ; le soin de l’homme, la douceur de l’abri, la variété dans la nourriture, effacent et font varier cette couleur dans les animaux domestiques, aussi bien que le mélange des races étrangères, lorsqu’on n’a pas soin d’assortir la couleur du mâle avec celle de la femelle, ce qui produit quelquefois de belles singularités, comme on le voit sur les chevaux pies, où le blanc et le noir sont appliqués d’une manière si bizarre et tranchent l’un sur l’autre si singulièrement qu’il semble que ce ne soit pas l’ouvrage de la nature, mais l’effet du caprice d’un peintre. »

Dans un autre passage de la même histoire, il décrit les variations produites par le climat et la nourriture sur les dimensions de la tête et du corps des chevaux. « On a remarqué que les haras établis dans des terrains secs et légers produisaient des chevaux sobres, légers et vigoureux, avec la jambe nerveuse et la corne dure, tandis que dans les lieux humides et dans les pâturages les plus gras ils ont presque tous la tête grosse et pesante, le corps épais, les jambes chargées, la corne mauvaise et les pieds plats : ces différences viennent de celles du climat et de la nourriture, ce qui peut s’entendre aisément. »

Dans l’histoire du lièvre, il insiste sur l’influence que le climat fait subir à cet animal, dont l’espèce est cependant très répandue. « La nature du terroir, dit-il[1], influe sur ces animaux comme sur tous les autres : les lièvres de montagnes sont plus grands et plus gros que les lièvres de plaine ; ils sont aussi de couleur différente ; ceux de montagne sont plus blancs sur le corps et ont plus de blanc sous le cou que ceux de plaine, qui sont presque rouges. Dans les hautes montagnes et dans les pays du Nord ils deviennent blancs pendant l’hiver et reprennent en été leur couleur ordinaire. Les lièvres des pays chauds, d’Italie, d’Espagne, de Barbarie, sont plus petits que ceux de France et des autres pays plus septentrionaux. »

Dans l’histoire du lion, il dit des animaux[2] : « Chacun a son pays, sa patrie naturelle, dans laquelle chacun est retenu par nécessité physique. Chacun est fils de la terre qu’il habite, et c’est dans ce sens qu’on doit dire que tel ou tel animal est originaire de tel ou tel climat. »

Buffon admettait, ainsi que nous l’avons montré plus haut, que les diverses parties de la terre n’ont pas toujours eu le même climat ; il en concluait

  1. Buffon, t. IX, p. 44.
  2. Ibid., p. 166.