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il est évident que tous les chiens, quelque différents, quelque variés qu’ils soient, ne font qu’une seule et même espèce.

» Mais ce qui est difficile à saisir dans cette nombreuse variété de races différentes, c’est le caractère de la race primitive, de la race originaire, de la race mère de toutes les autres races ; comment reconnaître les effets produits par l’influence du climat, de la nourriture, etc. ; comment les distinguer encore des autres effets, ou plutôt des résultats qui proviennent du mélange de ces différentes races entre elles, dans l’état de liberté ou de domesticité ? »

Dans son discours Sur les animaux sauvages, il insiste longuement sur l’action transformatrice qu’exercent le climat et la nourriture : « Les végétaux qui couvrent cette terre, dit-il[1], et qui y sont encore attachés de plus près que l’animal qui broute participent aussi plus que lui à la nature du climat ; chaque pays, chaque degré de température a ses plantes particulières ; on trouve au pied des Alpes celles de France et d’Italie ; on trouve à leur sommet celles des pays du Nord ; on retrouve ces mêmes plantes du Nord sur les cimes glacées des montagnes d’Afrique. Ainsi la terre fait les plantes, la terre et les plantes font les animaux, la terre, les plantes et les animaux font l’homme, car les qualités des végétaux viennent immédiatement de la terre et de l’air ; le tempérament et les autres qualités relatives des animaux qui paissent l’herbe tiennent de près à celles des plantes dont ils se nourrissent ; enfin, les qualités physiques de l’homme et des animaux, qui vivent sur les autres animaux autant que sur les plantes, dépendent, quoique de plus loin, de ces mêmes causes dont l’influence s’étend jusque sur leur naturel et sur leurs mœurs… Et si l’on considère encore chaque espèce dans différents climats, on y trouvera des variétés sensibles par la grandeur et par la forme ; toutes prennent une teinture plus ou moins forte du climat. Ces changements ne se font que lentement, imperceptiblement ; le grand ouvrier de la nature est le temps ; comme il marche toujours d’un pas égal, uniforme et réglé, il ne fait rien par sauts ; mais par degrés, par nuances, par succession, il fait tout ; et ces changements, d’abord imperceptibles, deviennent peu à peu sensibles et se marquent enfin par des résultats auxquels on ne peut se méprendre. »

Il est impossible, on le voit, de mieux préciser que ne le fait Buffon dans ce passage, le rôle du climat, de la nourriture et du temps dans la transformation des plantes, des animaux et de l’homme.

Dans l’histoire du cheval il insiste sur les variations de couleur déterminées par le climat et la nourriture. « Une autre influence du climat et de la nourriture, dit-il[2], est la variété des couleurs dans la robe des animaux ; ceux qui sont sauvages et qui vivent dans le même climat sont d’une même cou-

  1. Buffon, t. IX, p. 3.
  2. T. IX, p. 500.