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tion des animaux, il en a si bien scruté tous les détails et mis à découvert les éléments constitutifs, il nous a procuré une connaissance si exacte de l’œuf, qu’il serait superflu de discuter la théorie de l’emboîtement des germes. Au xviiie siècle, elle eut un succès considérable. Bonnet qui l’imagina, Haller qui s’y rallia aussitôt, et qui peut même passer pour l’un de ses créateurs, Spallanzani, Réaumur, etc., en furent les apôtres ardents et quelque peu violents, comme sont tous les apôtres. En combattant cette doctrine, Buffon s’exposait à leurs coups et ne manqua pas d’en recevoir. Les citations faites plus haut en portent témoignage.

La théorie des germes flottants. À côté de la théorie de l’emboîtement des germes, on trouve, au xviiie siècle, une autre façon d’interpréter la multiplication et la génération des animaux qui a pu servir de point de départ à l’hypothèse des « molécules organiques » de Buffon. On supposait qu’il existait dans l’atmosphère un nombre considérable de germes indestructibles de toutes les espèces d’animaux et de végétaux, germes ayant existé de tout temps et n’attendant que de pénétrer dans un organisme convenable pour s’y développer. D’après cette théorie, par exemple, les germes de l’homme flottent dans l’air, pénètrent dans la femme et s’y développent en un homme nouveau ou en une femme nouvelle. Bonnet, tout en repoussant cette doctrine, la traite cependant avec beaucoup de ménagements ; il la place bien au-dessus de celle de l’épigenèse, pour laquelle il réserve tous ses sarcasmes.

L’œuf est une simple cellule. C’est cette dernière cependant qui devait triompher dans la lutte des doctrines. Le microscope ne devait pas tarder, en effet, à montrer d’une façon aussi certaine que possible que l’œuf est un simple élément anatomique, sans autre organisation que sa division en une masse protoplasmique granuleuse, un noyau et une membrane d’enveloppe, que sa segmentation pour produire d’autres cellules, et, finalement, un embryon, ne commence qu’après la fusion de sa substance avec celle d’une cellule mâle. Nous reviendrons plus bas sur cette question.

L’hérédité.
L’origine des individus.
Je veux d’abord traiter celle que j’ai posée plus haut en ces termes : « Pourquoi l’homme donne-t-il toujours naissance à un autre homme, pourquoi tout animal ou tout végétal produit-il toujours un animal ou un végétal plus semblable à lui-même qu’à tous les autres animaux ou végétaux ? » C’est ce qu’on peut appeler la question de l’origine des individus, question qui se confond avec celle de l’hérédité.

Les « unités physiologiques » de H. Spencer. Deux réponses seulement y ont été faites depuis l’époque de Buffon : l’une par Darwin, l’autre par M. Hæckel. Je ne parle pas de l’hypothèse des « unités physiologiques » de M. Herbert Spencer, parce que cette hypothèse est, en réalité, non pas l’explication du fait, mais la constatation du fait lui-même, ainsi d’ailleurs que le reconnaît le savant philosophe anglais. Il admet que chaque organisme est formé d’unités qui « ont une structure spéciale dans laquelle elles tendent à s’arranger, comme en ont les unités de