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Je ne suivrai pas M. Marco dans l’étude qu’il fait des applications de cette théorie aux divers phénomènes de l’électricité dynamique et statique. Il me suffit d’avoir montré la base sur laquelle il s’appuie pour les expliquer.

J’agirai de la même façon pour ce qui concerne les phénomènes magnétiques. Quelques expériences fort curieuses et récentes ont mis les physiciens sur la voie d’une explication rationnelle de ces phénomènes en apparence si mystérieux. Je me bornerai à citer les trois ou quatre plus importantes. L’une des plus remarquables est due à M. de la Rive[1]. Plaçant une masse de fer cylindrique, pesant 10 kilogrammes et ayant 10 centimètres de diamètre, dans l’intérieur d’une grosse hélice de solénoïde parcouru par un courant intermittent, il entendit la masse de fer produire un son musical très clair. Des fils de fer bien recuits, ayant 1 à 2 millimètres de diamètre, longs de 1 à 2 mètres, tendus sur une table d’harmonie, ayant été placés dans l’axe des bobines dont les fils étaient parcourus par un courant intermittent, M. de la Rive entendit des sons tout à fait comparables à ceux de plusieurs cloches d’église vibrant harmoniquement au loin. Si l’on se rappelle que le son est produit par une vibration des molécules pondérables des corps, on est conduit à conclure de ces premières expériences que le passage du courant électrique dans le solénoïde détermine un changement de position dans les molécules du fer qui rend les sons. Les expériences suivantes confirment pleinement cette interprétation. De la Rive introduit dans une bobine électro-magnétique verticale, un disque de carton suspendu à un fil passant par son centre et couvert de limaille de fer. Dès que le courant passe dans le fil de la bobine, les morceaux de limaille se disposent en petites pyramides allongées dans le sens de l’axe de la bobine ; quand le courant cesse de passer, les pyramides s’écroulent, pour se reconstituer quand il passe de nouveau. Une autre expérience due à Grove, rend évidente la tendance qu’ont les parcelles de métal à se rapprocher les unes des autres, en se disposant dans l’axe du courant. Grove remplit d’eau un tube de verre dans lequel il introduit une poussière très fine d’oxyde magnétique de fer, puis il ferme les deux extrémités du tube à l’aide de rondelles en verre. Il a soin d’introduire assez de poussière pour qu’à l’état ordinaire la lumière ne puisse pas traverser le tube dans le sens de sa longueur. Plaçant ensuite ce tube dans une bobine, il constate qu’au moment du passage du courant, la lumière traverse longitudinalement le tube avec une grande aisance parce que les granules de poussière se sont rapprochés, en files parallèles à l’axe du courant. Enfin Joule a constaté qu’une barre de fer magnétisée par un courant s’allonge, tandis que son diamètre diminue, ce qui ne peut avoir lieu que si ses molécules se rapprochent, parallèlement à l’axe du courant. De toutes ces expériences, il est permis de conclure que les molécules pondé-

  1. Traité de l’électricité, t. Ier, p. 300.