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solide il passera bientôt à l’état liquide ; que de nouvelles vibrations lui soient communiquées par l’éther qui l’environne, le mouvement de translation de ses molécules sera encore augmenté, leurs liens de nouveau relâchés, et le corps passera de l’état liquide à l’état gazeux. On sait encore que quand un corps passe de l’état solide à l’état liquide ou de l’état liquide à l’état de vapeur ou de gaz, sa température n’augmente pas puisqu’il absorbe de la chaleur ; il en est ainsi « parce que les molécules qui changent d’état reçoivent le mouvement de translation qui est propre au nouvel état sans plus heurter les autres molécules qu’elles abandonnent, et conséquemment sans plus faire croître le mouvement vibratoire des molécules des corps. La chaleur de fusion et de vaporisation démontre que, dans l’état liquide, la force vive totale des atomes tourbillons doit être plus grande que dans l’état solide, et dans l’état gazeux plus grande que dans l’état liquide ; aussi a-t-on une restitution de chaleur dans les phénomènes inverses, c’est-à-dire dans la condensation des vapeurs et dans la solidification des liquides. »

On explique non moins facilement à l’aide de la même théorie, le pouvoir absorbant et le pouvoir émissif des corps, c’est-à-dire la propriété qu’ont les corps pondérables d’absorber et d’émettre inégalement de la chaleur, le pouvoir émissif de chacun étant toujours égal à son pouvoir absorbant. « Les particules éthérées de chaque atome tourbillon, dit M. F. Marco[1], peuvent évidemment vibrer quand elles sont heurtées dans l’acte de la combinaison chimique, ou bien quand elles sont frappées par des ondes éthérées lumineuses ou caloriques ; elles peuvent alors produire de nouvelles ondes, c’est-à-dire la lumière et la chaleur émises par les corps. L’absorption de la chaleur n’est qu’une communication du mouvement vibratoire de l’éther libre aux atomes tourbillons. Ainsi, il est évident que le pouvoir émissif doit être égal au pouvoir absorbant. De même, on comprend facilement pourquoi les corps réduits en poussière ont un pouvoir absorbant et émissif plus grand que celui des corps compacts tels que les métaux, si l’on considère que les corps réduits en poussière présentent une grande quantité de surface moléculaire en contact avec l’éther libre, tandis que le contraire advient avec les corps compacts tels que les métaux. Cette raison vaut pareillement pour un même corps ; et, partant, l’argent bruni possède un pouvoir émissif et absorbant moindre que l’argent dépuré chimiquement. »

La lumière. Je ne veux pas insister davantage sur cette question ; les faits que je viens de citer suffisent amplement pour montrer de quel secours est la théorie de l’éther dans l’explication des phénomènes caloriques. Je n’insisterai pas non plus sur les faits relatifs à la lumière. Il me suffira de rappeler que la lumière, de même que la chaleur, se transmet à travers l’éther pour montrer l’analogie qu’il doit y avoir entre les phénomènes intimes auxquels elle donne lieu

  1. Hirn, Annales de chimie et de physique, 1867, t. XI, p. 29.