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heurter contre une autre s’accroît, la longueur moyenne de la course libre étant en raison inverse du nombre des molécules restantes. Plus le vide devient parfait, plus s’accroît la distance moyenne qu’une molécule parcourt avant d’entrer en collision ; ou, en d’autres termes, plus la longueur moyenne de la course libre augmente, plus les propriétés physiques du gaz se modifient. Dans les tubes où le vide est presque parfait, les molécules du résidu gazeux peuvent s’élancer d’un bout à l’autre en subissant un nombre de chocs relativement faible, et en rayonnant du pôle avec une vitesse énorme ; elles présentent des propriétés nouvelles et assez caractéristiques pour justifier tout à fait l’appellation de matière radiante que nous empruntons à Faraday. »

Si les atomes d’un gaz se rencontrent d’autant moins fréquemment et parcourent des routes d’autant plus rectilignes que le gaz est plus raréfié, il est bien évident qu’en condensant le gaz, c’est-à-dire en diminuant son volume on déterminera la multiplication des chocs et on rendra plus irrégulière la course des atomes. Lorsque le gaz sera passé à l’état liquide, ses atomes ne parcourront plus que des courbes fermées, en frappant tangentiellement un grand nombre d’atomes voisins, très rapprochés. Le mouvement de translation sera ralenti par les chocs, mais, par contre, les chocs accroîtront la rapidité du mouvement de rotation des atomes. « Ainsi cessera, dit M. Félix Marco[1] cette force expansive propre à l’état gazeux, qui est due, ainsi que nous l’avons vu, au mouvement libre des particules ; et ce ne sera qu’à la surface, où les molécules ne sont point entourées de tous les côtés, que nous verrons persister une tendance de ces mêmes molécules à abandonner les autres, en vertu de la force vive de translation qui leur est restée. »

Quand les atomes pondérables d’un corps se rapprochent assez pour que toute translation véritable de chacun parmi les autres devienne impossible, le corps est à l’état solide. Le mouvement de translation a atteint son minimum, mais, en même temps, le mouvement de rotation a atteint son maximum. Il est bien certain cependant que les atomes pondérables des corps solides ne sont pas directement en contact les uns avec les autres ; la propriété que possèdent la plupart de ces corps de laisser passer les gaz ou les liquides, en est une preuve suffisante. Mais il est important de noter que quand on les chauffe, leur porosité augmente considérablement. Cela a été bien démontré pour les métaux. On a constaté aussi, que les métaux deviennent transparents sous l’influence de la chaleur ; le fer chauffé au rouge reste transparent jusqu’à l’épaisseur de plus d’un demi centimètre. Il faut conclure de ces faits que la chaleur détermine l’écartement des molécules pondérables. D’où il résulte encore : 1o que c’est en déter-

  1. L’unité dynamique des forces et des phénomènes de la nature, p. 12.