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l’éther, dès que cette force cesse son action ; c’est ce que l’on nomme l’élasticité. Dans les corps liquides, la pression exercée par l’éther sur les molécules pondérables pour les rapprocher étant beaucoup moindre, la cohésion est également moins grande ; il en est de même de l’élasticité qui n’est qu’une conséquence de la cohésion. Étant moins pressées, les molécules de corps liquides glissent les unes sur les autres et prennent la forme des vases qui contiennent le liquide, mais la surface de ce dernier se maintient horizontale, parce que la pression de l’éther sur les molécules est plus forte dans le sens de leur rapprochement que dans celui de leur écartement. C’est le contraire qui existe dans les gaz. L’action de l’éther interposé aux atomes gazeux étant plus grande que celui de l’éther extérieur, ces atomes sont écartés les uns des autres dans tous les sens avec assez de violence pour que les gaz prennent toujours la forme des vases dans lesquels ils sont contenus, et pour qu’ils exercent une pression énergique contre les parois, que ces dernières soient situées au-dessus ou au-dessous de l’horizontale. Il ne faut pas oublier cependant que cette faculté, à laquelle on a donné le nom d’expansibilité, de force d’expansion, etc., a des limites, et que les gaz abandonnés à eux-mêmes dans un espace suffisamment grand et rempli d’air atmosphérique n’occupent pas tout cet espace ; la pression de l’éther qui tend à écarter les molécules est alors combattue par celle de l’atmosphère. Mais si l’espace est vide, c’est-à-dire dépourvu de toute matière pondérable, l’écartement des molécules produit par la pression de l’éther intermédiaire est assez grand pour que le gaz occupe tout l’espace.

Comment expliquer que l’éther interposé aux atomes d’un même corps pondérable puisse exercer des pouvoirs assez différents pour que ce corps se montre successivement gazeux, liquide et solide ; en d’autres termes quelle est la cause qui fait varier l’intensité de la pression exercée par l’éther sur les atomes de la matière pondérable ? La chaleur, répond-t-on immédiatement. Fort bien ; il suffit, en effet, de chauffer un corps solide, la glace par exemple, c’est-à-dire de lui donner de la chaleur pour le faire passer d’abord à l’état liquide, puis à l’état gazeux. Mais, qu’est-ce que la chaleur elle-même ? La théorie de l’éther répond : une forme particulière du mouvement des atomes. Ceci demande explication.

Les mouvements des atomes. Nous avons vu plus haut que les atomes de la matière pondérable s’entrechoquent sans eux. La conséquence nécessaire de ces chocs est le déplacement ou, pour employer un terme plus scientifique, un mouvement de translation à la fois de l’atome qui a reçu le choc et de celui qui l’a donné ; l’un et l’autre ne peuvent manquer de choquer à leur tour soit d’autres atomes pondérables, soit l’éther qui les entoure, éther qui lui-même transmettra le choc aux atomes pondérables et à d’autres atomes éthérés. Il suffit donc qu’un seul atome d’éther ou de matière pondérable soit mis en mouvement pour que ce mouvement se transmette de proche en proche à l’univers tout