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particules, se rapprocher ou s’écarter, De l’affinité d’après Buffon. cela est dû à ce que la matière est douée dans toutes ses parties d’une propriété générale, essentielle, l’attraction. Buffon confond « l’affinité » des chimistes avec l’attraction[1]. « Les lois d’affinité par lesquelles les parties constituantes de ces différentes substances se séparent des autres pour se réunir entre elles et former des matières homogènes, sont les mêmes que la loi générale par laquelle tous les corps célestes agissent les uns sur les autres ; elles s’exercent également et dans les mêmes rapports des masses et des distances ; un globule d’eau, de sable ou de métal, agit sur un autre globule comme le globe de la terre agit sur celui de la lune : et si jusqu’à ce jour l’on a regardé ces lois d’affinité comme différentes de celles de la pesanteur, c’est faute de les avoir bien conçues, bien saisies, c’est faute d’avoir embrassé cet objet dans toute son étendue. »

Cette vue est absolument juste. Si l’on admet l’attraction comme cause des mouvements et des rapports des corps célestes, on doit l’admettre aussi comme cause des mouvements et des rapports des particules matérielles les plus minimes ; et l’affinité chimique, c’est-à-dire la prétendue force en vertu de laquelle les atomes et les molécules se rapprochent et se combinent pour former les divers corps composés ne doit être considérée que comme une forme de l’attraction.

Figure des molécules d’après Buffon. Un peu plus loin, cherchant à expliquer la différence de densité qui existe entre les corps, Buffon ajoute quelques considérations qu’il me paraît utile de reproduire. Il suppose que les molécules des corps sont de formes différentes et que la densité est d’autant moindre que plus d’intervalles existent entre les molécules, les intervalles dépendant eux-mêmes de la forme des molécules. « Newton, dit-il[2], a bien soupçonné que les affinités chimiques, qui ne sont autre chose que les attractions particulières dont nous venons de parler, se faisaient par des lois assez semblables à celles de la gravitation ; mais il ne paraît pas avoir vu que toutes ces lois particulières n’étaient que de simples modifications de la loi générale, et qu’elles n’en paraissaient différentes que parce qu’à une très petite distance la figure des atomes qui s’attirent fait autant et plus que la masse pour l’expression de la loi, cette figure entrant alors pour beaucoup dans l’élément de la distance.

Rapport de la figure des molécules avec la densité des corps, d’après Buffon. » C’est cependant à cette théorie que tient la connaissance intime de la composition des corps bruts ; le fond de toute matière est le même, la masse des molécules et le volume, c’est-à-dire la forme, serait aussi la même, si la figure des parties constituantes était semblable. Une substance homogène ne peut différer d’une autre qu’autant que la figure de ses parties primitives est différente ; celle dont toutes les molécules sont sphériques doit être spécifiquement une fois plus légère qu’une autre dont les molécules seraient

  1. Vues de la nature, première vue, t. II, p. 208.
  2. Ibid., t. II, p. 209.