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différents effets ; et si nous comparons l’attraction magnétique à l’attraction universelle, nous verrons qu’elles diffèrent très essentiellement. L’aimant est, comme toute autre matière, sujet aux lois de l’attraction générale, et en même temps, il semble posséder une force attractive particulière et qui ne s’exerce que sur le fer ou sur un autre aimant. »

La « force attractive » de l’aimant à laquelle il ajoute une « force directive » lui paraît être « extérieure » à l’aimant lui-même ; « elle existe à part, et n’en existerait pas moins quand il n’y aurait point de fer ni d’aimant dans le monde ; mais il est vrai qu’elle ne produirait pas les mêmes effets qui, tous, dépendent du rapport particulier que la matière ferrugineuse se trouve avoir avec l’action de cette force[1]. »

Je ne veux pas insister davantage sur ce sujet. Malgré l’obscurité qui règne dans les opinions de Buffon, nous possédons maintenant les éléments nécessaires pour en dégager les traits principaux. Pour le savant naturaliste, la chaleur, la lumière, le feu, sont des matières divisées en particules plus ou moins petites ; l’électricité et le magnétisme sont des « forces » particulières, extérieures aux corps magnétiques ou électrisés ; enfin, l’attraction est une « propriété générale » de la matière, ce qu’il appelle une « vraie cause ».

Je reviendrai plus tard à la chaleur, à la lumière et à l’électricité. Je veux d’abord examiner la question de « l’attraction universelle » qui est la plus importante et dont la solution entraîne celle de tous les grands problèmes physiques.

On sait que Newton expliquait les rapports fixes qui existent entre les corps célestes et les mouvements dont ces corps sont doués par une force d’attraction qui tendrait à les faire tomber les uns sur les autres comme une pierre tombe sur le sol, faisant équilibre à la force d’impulsion dont ils sont doués. Tous les faits naturels pouvant être expliqués à l’aide des lois de l’attraction, les physiciens n’hésitèrent pas à admettre l’existence d’une force d’attraction, inhérente à toutes les particules matérielles, sans cesse en jeu dans l’univers et régissant d’une façon souveraine les rapports de tous les corps grands et petits les uns avec les autres. C’est cette doctrine que Buffon expose dans les lignes suivantes[2] : « Il n’y a dans la nature qu’une seule force primitive : c’est l’attraction réciproque entre toutes les parties de la matière. Cette force est une puissance émanée de la puissance divine, et seule elle a suffi pour produire le mouvement et toutes les autres forces qui animent l’univers. Car, comme son action peut servir en deux sens opposés en vertu du ressort qui appartient à toute matière, et dont cette même puissance d’attraction est la cause, elle repousse autant qu’elle attire. On doit donc admettre deux effets généraux, c’est-à-dire l’attraction

  1. Traité de l’aimant et de ses usages, t. IV, p. 122.
  2. Ibid., t. IV, p. 76.