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ans elle aura atteint son maximum ; l’orbite terrestre devenue alors presque circulaire, recommencera lentement à s’allonger. Il est bien manifeste que dans les périodes où l’orbite de la terre atteint son maximum d’excentricité, les saisons doivent être différentes de ce qu’elles sont, alors qu’au contraire l’orbite est devenue presque circulaire. Dans les premières, en effet, au moment de l’aphélie, la terre est beaucoup plus éloignée du soleil que pendant les secondes.

Il est extrêmement difficile de déterminer la somme exacte d’influence que les phénomènes astronomiques dont nous venons de parler exercent sur les variations de la température terrestre pendant le cours des temps. Certains auteurs la croient très grande, d’autres la considèrent comme à peu près négligeable. Lyell cite le fait suivant, qui semble venir à l’appui de l’influence de la précession des équinoxes : « M. Vinet, dit-il[1], a signalé, à titre de fait historique, que les glaciers de la Suisse furent plus considérables après le xe siècle qu’ils ne le sont aujourd’hui, et qu’ensuite après s’être retirés pendant quatre siècles, ils avançaient de nouveau et reprenaient lentement leurs positions primitives. Ce qui signifie, en d’autres termes, que pendant la période où le soleil était le plus près de la terre au solstice d’hiver, c’est-à-dire deux siècles avant et deux siècles après 1248, il y eut la plus grande fonte de glace dans l’hémisphère septentrional. » D’un autre côté, M. Croll[2], a émis l’opinion que le maximum d’excentricité de l’orbite terrestre augmenterait considérablement le froid dans l’hémisphère où l’hiver arriverait en aphélie. La température baisserait d’un cinquième dans cet hémisphère, toute l’humidité de l’atmosphère tomberait dans les latitudes élevées, sous forme de neige, et, bien que la chaleur de l’été qui, lui, surviendrait en périhélie, fût cinq fois aussi forte que celle dont nous jouissons aujourd’hui, elle serait insuffisante pour faire disparaître toute la neige, parce que la fonte continuelle de quantités considérables de neige donnerait naissance à des brouillards qui entraveraient la marche et l’action calorifique des rayons solaires. M. Croll pense que la quantité de neige et de glace accumulée au niveau du pôle de l’hémisphère envisagé plus haut serait suffisante pour déterminer un affaissement de ce point du globe. Quant à l’autre hémisphère, il jouirait, d’après Croll, pendant la même période, d’un printemps à peu près éternel ; en effet, son été survenant en aphélie, il serait exposé à une chaleur solaire tempérée par la grande distance, tandis que son hiver ne pourrait pas être rigoureux puisqu’il aurait lieu en périhélie, c’est-à-dire alors que la terre serait aussi rapprochée que possible du soleil.

Faut-il penser avec M. Croll que la période carbonifère de l’histoire de la terre a coïncidé avec des phases de précession et d’excentricité de nature à produire dans notre hémisphère la température chaude, humide et uniforme

  1. Principes de géologie, t. Ier, p. 364.
  2. In Philosophical magazine, 1864.