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dans ses dépôts, ce sont les grès, les schistes argileux, les grauwackes et parfois les calcaires. Les fossiles sont nombreux et variés ; on en compte jusqu’à neuf mille espèces, sur lesquelles une quarantaine d’espèces de poissons ; mais ces derniers ne se trouvent que dans les couches les plus élevées, ce qui permet de supposer que la formation silurienne a eu une durée extrêmement considérable. Un autre fait corrobore cette opinion, c’est l’étendue immense de la surface terrestre dans laquelle on trouve des dépôts siluriens ; cette étendue est si considérable que certains géologues supposent que pendant la période silurienne presque tout le globe était couvert par les eaux et que, seules, quelques îles émergeaient au-dessus de cet océan. Mais cette opinion paraîtra fort douteuse si l’on songe que la période silurienne offre des formes tout à fait locales, c’est-à-dire formées d’espèces que l’on ne trouve pas dans d’autres régions. M. de Barante, qui a fait une étude aussi remarquable que patiente du silurien de Bohême, a mis en relief ce fait que des deux mille huit cents espèces d’animaux marins trouvés dans cette région, il n’y en a que deux cent sept qui existent dans le silurien des autres régions. Il faut donc en conclure, premièrement que la mer silurienne de la Bohême a été isolée des autres mers de la même époque pendant un laps de temps d’une durée considérable, puisque deux mille six cents espèces s’y sont produites pendant ce temps ; en second lieu, que les conditions de température, de salure, etc., de la mer de Bohême étaient différentes de celles des autres mers, car si les conditions cosmiques n’avaient pas varié depuis l’isolement de cette mer, il n’aurait pu s’y développer aucune espèce nouvelle. Or, les conditions de température, qui sont les plus importantes, dépendent beaucoup de l’étendue et de la distribution des continents à la surface du globe ; d’où il faut conclure que pendant la période silurienne, des modifications importantes ont eu lieu dans le nombre, la disposition et les relations des continents et des mers, modifications assez étendues pour que presque tous les points du globe aient été tour à tour envahis par les eaux.

Quoiqu’un grand nombre de roches éruptives aient été poussées au dehors pendant la formation silurienne, rien ne permet de croire qu’elle ait vu se produire de grands soulèvements de montagnes ; tout, au contraire, permet de penser que pendant cette formation et les précédentes les inégalités de la surface du sol étaient beaucoup moindres qu’elles ne le sont aujourd’hui. C’est, sans doute, à ce fait qu’il faut attribuer l’uniformité relative de température qui régnait alors à la surface du globe, uniformité qui, cependant, devait tendre à s’effacer, puisque nous voyons surgir des espèces locales.

Formation dévonienne. La formation dévonienne se confond intérieurement en beaucoup de points avec le silurien, et supérieurement avec la première. Elle ressemble beaucoup au silurien par sa structure pétrographique, mais elle s’en distingue, au point de vue paléontologique, par le développement que prennent les poissons et par l’extension que commencent à présenter les plantes ; c’est pendant cette