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et affaissées, couvertes par les eaux et mises à nu ; on doit conclure, en effet, de ce fait indéniable, que les détritus des roches primitives ont été plusieurs fois remaniés et transportés.

Troisième époque. La troisième grande époque de l’histoire de la terre, la seule dont il nous soit permis d’analyser les documents et les titres, commence à la formation des premiers dépôts sédimentaires et s’étend jusqu’à nos jours. Elle comprend les 3e, 4e, 5e, 6e et 7e époques de Buffon.

Nous ne savons rien de précis sur les débuts de cette grande époque. Tout ce qu’il nous est permis de penser, c’est qu’il s’est écoulé un temps probablement assez long entre le moment où les premières mers se sont formées par condensation des vapeurs atmosphériques et l’apparition des premiers organismes vivants. Pendant ce temps, sous l’influence de marées et de courants identiques à ceux qui existent aujourd’hui, les eaux de la mer ont du dissocier et dissoudre les matériaux constituant la surface du globe, les transporter d’un point à un autre, les manier et les remanier au point de les rendre d’autant plus méconnaissables, qu’à ces actions mécaniques se joignaient, comme aujourd’hui, des actions chimiques innombrables. En même temps, des soulèvements et des affaissements lents ou brusques, violents ou insensibles, se produisaient en divers points du globe, tantôt élevant des continents dans des lieux couverts par les eaux, tantôt affaissant des terres et déterminant leur envahissement par la mer. Les phénomènes volcaniques, les sources thermales et froides, les pluies, les torrents, les ruisseaux, les fleuves, ajoutaient leurs puissantes influences à celles des mers pour modifier sans cesse la surface du globe. Mais tout cela s’effectuait sans qu’aucun être vivant en fût le témoin, et l’époque de ces événements est si reculée, la terre a été si souvent remaniée depuis qu’ils ont eu lieu, qu’il n’en reste peut-être plus aucune trace visible. Qu’on admette ou non l’existence d’un océan universel, qu’on croie ou non à celle d’un noyau terrestre encore fluide et chaud, que la terre se soit refroidie du centre à la surface, comme le pense Poisson, ou de la surface au centre comme le pensent avec Buffon la plupart des géologues actuels, il semble difficile de rejeter l’opinion que les premières mers étaient formées d’eaux jouissant d’une température élevée ; la vapeur d’eau de l’atmosphère a dû, en effet, se précipiter à la surface de la terre à une époque où cette surface était encore chaude. Or, la température élevée de l’eau des mers a dû favoriser à la fois la dissociation, la dissolution et les transformations des roches primitives, et aussi la production des phénomènes chimiques qui ont déterminé la formation des premiers organismes vivants. Mais, ainsi que nous le dirons plus tard, ces premiers organismes étaient d’une extrême simplicité ; leur corps était mou, sans squelette, et nulle trace de leur existence n’a pu être gardée. De tous ces faits résulte la difficulté insurmontable d’établir l’histoire des débuts de cette troisième période ; aussi sommes-nous obligés de la laisser de côté. Je me