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plus profondément ; mais il faut tenir compte, dans l’usage qu’on fait de ce caractère, des déplacements et des bouleversements que les couches ont pu subir. Ainsi que nous avons eu l’occasion de le dire plus haut, il n’est pas rare de rencontrer des couches qui, d’horizontales qu’elles étaient d’abord, ont été rendues obliques, redressées, parfois même totalement renversées, au point que les supérieures sont devenues inférieures et réciproquement. Ces faits étant très fréquents, il importe de ne jamais les perdre de vue. Pour éviter les erreurs qu’ils sont capables de causer, il faut avoir soin de ne pas s’en tenir, dans l’appréciation de l’âge des dépôts, à une seule région du globe ; il faut comparer les régions qui offrent les mêmes terrains, de manière à se rendre un compte exact des bouleversements qui ont pu être produits.

Les redressements, plissements, renversements de couches fournissent des indications précieuses pour déterminer l’âge des affaissements ou des soulèvements dont la surface de la terre a été le théâtre. Quand, par exemple, on trouve au pied d’une montagne des couches redressées, au-dessus desquelles gisent d’autres couches horizontales, on est en droit d’affirmer que le soulèvement de la montagne s’est effectué après le dépôt des premières et avant celui des secondes ; mais il ne faut pas oublier que cet intervalle de temps peut avoir été d’une très longue durée, ainsi que nous l’avons démontré précédemment. On peut encore, par l’inspection des couches, établir l’âge relatif des éruptions de roches volcaniques. Si certaines couches sédimentaires sont traversées par des filons de basalte, de trachite, de granit, tandis que les couches supérieures sont intactes, on peut affirmer que l’éruption est postérieure au dépôt des premières couches et antérieure à celui des secondes ; mais, dans ce cas comme dans le précédent, on n’a nul moyen de déterminer l’époque exacte, le siècle pendant lequel le phénomène s’est produit.

Le second élément dont on fait usage dans la détermination de l’âge relatif des terrains est la nature des fossiles qu’ils contiennent. Celui-ci est le plus important ; mais il ne peut donner, comme le précédent, que des indications relatives. Lorsqu’on eut admis que les espèces animales et végétales étaient toutes produites par transformation les unes des autres, on fut naturellement conduit à admettre que les plus inférieures et les plus simples avaient fait leur apparition les premières et que l’époque de la genèse de chaque espèce était d’autant plus rapprochée delà nôtre que cette espèce était elle-même plus parfaite. Les recherches géologiques ne tardèrent pas à confirmer ces vues. On s’assura que les couches situées le plus profondément au-dessous de la surface du sol ne renferment que des restes d’animaux inférieurs ; on vit que les vertébrés n’apparaissent que dans des couches beaucoup plus superficielles et manifestement plus récentes que les précédentes ; et, enfin, on ne trouva des squelettes d’hommes que dans les terrains les plus rapprochés de la surface. Ces faits ayant été bien constatés dans des points du