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dépourvu de tout moyen de connaître la période d’immersion, et il conclura à l’existence d’une phase d’émersion unique, de très longue durée, comprenant, en réalité, trois phases consécutives distinctes : une première phase d’émersion, une phase d’immersion dont tous les témoins ont disparu, et une deuxième phase d’émersion également sans témoins. Une seconde cause d’erreur rend très difficile la rédaction de l’histoire géologique d’une portion même très limitée du globe : je veux parler des changements de climats.

Il est aujourd’hui bien démontré que les régions septentrionales ont été soumises jadis à un climat aussi chaud que celui qui règne aujourd’hui sous les tropiques, de même qu’on sait, à n’en pas douter, que certaines régions, actuellement tempérées de notre globe, ont été soumises, pendant un laps de temps considérable, à des froids tellement intenses qu’elles étaient couvertes de glaciers. Mais si l’on a pu reconnaître cette succession de phases de chaud et de froid dans quelques parties de nos continents, il n’est pas douteux que dans d’autres toutes les traces qu’elles avaient laissées ont pu être enlevées, soit par les eaux courantes, soit par des immersions et des émersions consécutives.

Dois-je rappeler que les actions métamorphiques produites par la chaleur, ou par l’eau, ou par les réactions chimiques, ou par ces trois agents à la fois, sont encore de nature à modifier totalement le faciès et les caractères des terrains. Rappelons-nous, par exemple, que les dépôts de tests calcaires de foraminifères du golfe du Mexique, sont actuellement en voie de remplacement par des dépôts d’argile, et nous aurons une idée suffisante des troubles que le métamorphisme, sans cesse agissant, apporte dans les témoignages les plus indispensables au géologue.

Des transformations de la plus haute importance pourront ainsi échappa à l’observateur le plus attentif, et les histoires géologiques particulières des diverses régions du globe sont exposées à offrir des inexactitudes égales à celles qui incombent presque fatalement à l’histoire générale.

Tout ce que peut faire le géologue, c’est d’établir les dates relatives des principales transformations qui se sont produites à la surface de notre globe, c’est de prouver que tel phénomène est antérieur ou postérieur à tel autre, et que tels et tels faits se sont produits pendant l’intervalle de temps qui s’est écoulé entre tels et tels autres.

Documents pour l’histoire de la terre. J’ai déjà indiqué plus haut les éléments dont on fait usage pour écrire cette histoire relative des transformations subies par les diverses régions du globe.

Le premier de ces éléments est la disposition que les couches affectent les unes par rapport aux autres ; le second est la nature des animaux ou des végétaux fossiles qu’elles renferment.

Toutes les fois que des couches sont régulièrement superposées, on est en droit de les considérer comme d’autant plus anciennes qu’elles sont situées