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trouve des cas incontestables : on cite des marnes, des argiles et des grès qui ont été fondus et vitrifiés sur les parois de la fente par laquelle des basaltes en fusion ont été projetés au dehors. Au Puy-de-Dôme, on voit du granit dont le feldspath a été fondu et le mica calciné au contact du basalte, etc. Les actions métamorphiques de beaucoup les plus énergiques et les plus fréquentes sont celles qu’exerce la vapeur d’eau surchauffée rejetée avec les matières fondues. La vapeur d’eau pénètre profondément dans les roches poreuses avec lesquelles elle se trouve en rapport, modifie leur état physique, et dépose entre leurs molécules les substances qu’elle tient en dissolution. Dans les Pyrénées, les Alpes, la Scandinavie, on trouve fréquemment des calcaires qui non seulement ont été changés en marnes par l’eau surchauffée, mais qui encore ont été imprégnés de minéraux étrangers, tels que des silicates calcaires. Si l’on songe que la terre contient soit un grand foyer central de chaleur, soit un grand nombre de foyers locaux distribués à peu de distance de sa surface et capables de recevoir de l’eau par filtration, on comprendra quelle importance doivent avoir les actions métamorphiques dans le voisinage de tous les foyers de chaleur. Les roches y sont modifiées dans leur structure physique et dans leur composition chimique, au point de changer entièrement de nature. À la surface de notre globe, ces actions sont, en fait, moins importantes que les actions chimiques dont nous avons déjà parlé plus haut ; il est cependant nécessaire d’en tenir compte, quand on veut établir l’âge d’une roche ou son mode de formation.

Lente disparition des animaux et des végétaux. La lenteur excessive avec laquelle la plupart des espèces animales et végétales disparaissent est un des arguments les plus puissants qu’il soit permis d’invoquer en faveur de la théorie des causes actuelles et contre celle des révolutions. C’est seulement dans quelques îles de peu d’étendue, ou bien dans des régions où l’homme a fait sentir son influence qu’on peut constater la disparition rapide de certaines espèces terrestres, animales ou végétales. Le castor, par exemple, disparaît rapidement de l’Europe ; il en serait ainsi de toutes les espèces d’animaux auxquelles l’homme fait la chasse, si les gouvernements européens ne prenaient pas des mesures pour assurer leur conservation. On peut en dire autant des poissons, des écrevisses, qui peuplent nos étangs et nos rivières. Mais là où la nature est livrée à elle-même, et surtout dans la mer, dont les conditions de température sont relativement peu variables, les espèces animales et végétales ont une durée extrêmement considérable. Un très grand nombre d’espèces modernes se montrent déjà dans les roches qui composent les terrains tertiaires. Certaines d’entre elles même remontent beaucoup plus haut. En examinant la faune et la flore des diverses époques géologiques, on s’assure rapidement qu’un grand nombre d’espèces existent à la fois dans deux époques successives, ou, si l’on veut, ont persisté pendant toute la durée de deux périodes, c’est-à-dire pendant un laps de temps tellement considérable que notre imagination peut