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monde ; il suffit d’admettre qu’une eau riche en une substance minérale précipitable s’est déposée entre les grains de sable et les a unis en une masse destinée à devenir d’autant plus dure et compacte qu’elle subira ultérieurement une pression plus grande ou qu’elle s’imbibera davantage du ciment cohésif. Tantôt ce dernier sera un sel de silice, tantôt ce sera du carbonate de chaux ou de magnésie, de l’oxyde ou de l’hydrate de fer unis à de l’argile ou à du calcaire, etc.

Les brèches ne sont pas autre chose que des fragments anguleux de roches siliceuses, unis par un ciment calcaire ou magnésien. Les conglomérats sont des galets roulés unis par un ciment de même nature.

Rien de plus facile que de comprendre la façon dont ces roches se sont formées sur les bords des rivages couverts de galets et amenés par des eaux riches en sels calcaires. Une foule de plages offrent actuellement des conglomérats en voie de formation, absolument semblables à ceux que l’on trouve en si grande abondance dans les Alpes et le Jura.

Est-il plus difficile d’expliquer par des causes actuelles la formation des rognons de silex que l’on trouve dans les carrières à plâtre ? N’est-il pas naturel d’admettre qu’ils ont été produits par le dépôt, dans des cavités de la roche calcaire, de silice entraînée par les eaux qui filtrent à travers les couches superficielles de notre globe ?

On peut non moins aisément se rendre compte de la façon dont se sont formés les argiles et les schistes argileux. Les roches siliceuses que l’eau entraîne se fragmentent souvent en débris encore plus petits que les sables les plus fins, en une sorte de poussière presque impalpable qui se sépare du sable en vertu de sa densité, se précipite en couches minces, durcit et forme, suivant les caractères de disposition et de solidité qu’elle présente, les roches que l’on connaît sous les noms de Lehm, d’argile, de schistes argileux, etc., roches qui varient non seulement par la structure, mais encore par la nature des poussières qui les forment et par celle des ciments qui s’y infiltrent.

Quelques roches siliceuses ont été déposées dans les eaux douces ; citons la meulière des environs de Paris, que tout le monde connaît, et qui se trouve sur le sommet des plateaux de Montmorency, de Meudon, etc. La formation de ces roches est facile à expliquer par le dépôt de la silice contenue dans les eaux de sources qui, sans doute, jaillissaient autrefois dans les points où l’on trouve la meulière. Ces sources étaient-elles chaudes comme les geysers d’Islande ? C’est peu probable, étant donné qu’on trouve dans la meulière une grande quantité de fruits de characées et de coquilles de mollusques qui vivent dans les eaux froides. Il paraît plus rationnel d’admettre que la meulière provient d’un calcaire siliceux déposé dans une eau riche en acide carbonique ; le carbonate de chaux de ce calcaire a été dissout tandis que la silice s’est précipitée.