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ces organes végétaux avaient dû séjourner plus de trois à quatre mois dans le sol. Dujardin conclut de l’examen des espèces auxquelles appartenaient les végétaux et les animaux, qu’ils devaient provenir des vallées de l’Auvergne et du Vivarais, c’est-à-dire d’une distance de 240 à 250 kilomètres.

Ces faits prouvent d’une manière indubitable l’existence, dans la profondeur du sol de véritables canaux communiquant, au moins par l’une de leurs extrémités, avec le lit des lacs, des étangs, des rivières et de la mer.

Fleuves qui se perdent dans le sol. Ce n’est pas tout. « Il y a, dit Buffon[1], des fleuves qui se perdent dans qui se perdent les sables, d’autres qui semblent se précipiter dans les entrailles de la terre ; le Guadalquivir en Espagne, la rivière de Gottemburg en Suède, et le Rhin même, se perdent dans la terre. On assure que dans la partie occidentale de l’île de Saint-Domingue, il y a une montagne d’une hauteur considérable, au pied de laquelle sont plusieurs cavernes où les rivières et les ruisseaux se précipitent avec tant de bruit, qu’on l’entend de sept ou huit lieues. (Voyez Varenii Geograph. general., p. 43.)

» Au reste, le nombre de ces fleuves qui se perdent dans le sein de la terre est fort petit, et il n’y a pas d’apparence que ces eaux descendent bien bas dans l’intérieur du globe ; il est plus vraisemblable qu’elles se perdent, comme celles du Rhin, en se divisant dans les sables, ce qui est fort ordinaire aux petites rivières qui arrosent les terrains secs et sablonneux ; on en a plusieurs exemples en Afrique, en Perse, en Arabie, etc. »

Origine des fentes et des canaux souterrains. Les fissures, les fentes et les canaux souterrains dont nous venons de parler n’ont certainement pas tous la même origine. Les fentes perpendiculaires sont très probablement dues, ainsi que l’indiquait Buffon, à la dessiccation et à la contraction consécutive des roches. Mais la dessiccation peut être produite, soit par la chaleur solaire, soit par la chaleur intérieure du globe. La chaleur du soleil n’agit qu’à la surface du sol. Quant aux fentes situées plus profondément, il faut probablement les attribuer à une contraction des roches déterminée par la chaleur des foyers volcaniques, ou, si l’on admet l’existence d’un noyau terrestre incandescent, à la chaleur énorme de ce noyau. Certaines fentes doivent être attribuées au glissement des couches les unes sur les autres, phénomène qui accompagne presque toujours l’exhaussement ou l’affaissement du sol. Quant aux canaux souterrains, une partie doit avoir été creusée par les eaux qui circulent au-dessous de la surface, soit que les eaux aient dissout la roche à travers laquelle elles filtrent, soit qu’elles l’aient désagrégée au point de pouvoir entraîner ses fragments ; une autre partie est due, sans doute, à la dislocation des roches par les feux intérieurs. C’est par ce dernier procédé que se sont formées la plupart des cavernes naturelles, cavernes dont quelques-unes paraissent pénétrer très profondément dans le sol. « La terre, dit Buffon[2], ayant subi

  1. Des fleuves, t. Ier, p. 157
  2. Des volcans et des tremblements de terre, t. Ier, p. 215.