Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome I, partie 1.pdf/182

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

accompagné la production des éruptions volcaniques célèbres. Parmi ces faits, je pourrais rappeler l’apparition de Monte-Nuovo, près de Pouzzole, en 1538, la formation des cônes secondaires de l’Etna, l’ensevelissement de Pompéi, d’Herculanum et d’un grand nombre d’autres villes ou villages sous les laves ou les cendres rejetées par les volcans et les désordres considérables occasionnés par les tremblements de terre. Tous ces phénomènes se produisent, il est vrai, très brusquement, et peuvent déterminer de grands ravages, mais ils n’ont rien de commun avec les soulèvements des chaînes de montagnes ou les grands affaissements de continents, dont la surface de la terre porte les traces indélébiles. Ils déterminent la destruction d’un certain nombre d’hommes et d’ouvrages humains, d’animaux et de végétaux ; des villages, des villes peuvent être couverts par les déjections des volcans ; des surfaces énormes de champs peuvent être ainsi stérilisées ; mais, tout cela est local, ne ressemble en rien aux révolutions imaginées par Cuvier et de Beaumont, révolutions qui auraient fait disparaître d’un seul coup un nombre immense, non pas d’individus, mais d’espèces et même de genres et de familles d’animaux et de végétaux. Ces révolutions effroyables, parmi les phénomènes qui se produisent sous nos yeux, aucun ne peut nous en donner une idée, et nous sommes obligés, pour les concevoir, de faire des efforts d’imagination aussi grands qu’inutiles.

Causes actuelles. Il est, en effet, facile de s’assurer que si aucun fait ne démontre l’existence de ces révolutions, tous ceux qu’il nous est actuellement permis d’observer concordent pour nous faire croire que les transformations, même les plus considérables, subies par notre globe, ont pu être déterminées par les causes qui agissent de nos jours. Nous avons, plus haut, divisé ces causes en deux groupes : celui des causes ignées et celui des causes aqueuses. Nous allons les étudier successivement en commençant par les premières.

Causes ignées actuelles. Nous avons déjà eu l’occasion, à propos des volcans et de la formation des montagnes, de parler de l’action actuelle des causes ignées. Nous n’aurons que peu de chose à ajouter ici. Il est impossible de méconnaître l’importance de ces causes dans les transformations locales que subissent, de nos jours, certaines portions de la surface de notre globe. Dans le nouveau monde, la vaste région des Andes ; dans l’ancien, les contrées volcaniques de l’Europe et de l’Asie sont chaque jour le théâtre de quelque bouleversement produit par les éruptions volcaniques ou les tremblements de terre.

Quoique ces phénomènes n’aient rien de commun, ainsi que je l’ai fait remarquer plus haut, avec les révolutions de Cuvier et d’Élie de Beaumont, ils n’en ont pas moins une action sérieuse sur les contours extérieurs de notre globe et peuvent, en se répétant, les modifier beaucoup. À la suite de certains tremblements de terre, on a vu la mer envahir des régions qui avaient été jusqu’alors à l’abri de ses atteintes, ou, au contraire, se retirer de localités qu’elle recouvrait depuis de nombreux siècles. Parmi les faits