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répandus dans l’épaisseur des couches superficielles de la terre que par celle du feu central. L’existence d’un noyau de substances en fusion au centre de la terre n’est pas indispensable à celle des foyers des volcans, puisque les phénomènes chimiques et magnétiques, dont la terre est indubitablement le siège, sont assez intenses pour produire la chaleur nécessaire à la fusion de toutes les roches qui entrent dans la composition du sol et qui sont rejetées par les volcans.

Parmi les arguments qui ont été donnés en faveur de l’existence d’un noyau terrestre, fluide et incandescent, nous devons rappeler, à la suite des volcans, les tremblements de terre. Mais comme, de l’avis de tous les géologues, les tremblements de terre sont très étroitement liés aux phénomènes volcaniques, ce que nous avons dit de ces derniers peut également s’appliquer aux premiers. S’il est possible d’attribuer les phénomènes volcaniques à l’existence, dans les couches superficielles de la terre, de cavités remplies de roches en fusion, on peut, avec autant de raison, appliquer cette hypothèse aux tremblements de terre.

Les phénomènes d’abaissement et de soulèvement constatés à la surface de la terre non seulement aux époques anciennes de son histoire, mais encore de nos jours, peuvent être expliqués de la même façon ; mais la nature particulière de cette étude m’oblige à entrer dans quelques détails.

Formation des montagnes d’après Buffon. Exposons d’abord l’opinion émise par Buffon, relativement à la cause productrice de ces phénomènes. On peut distinguer à cet égard deux phases dans les idées de Buffon. Dans son discours sur l’Histoire et la théorie de la terre, il attribue la formation des montagnes, aussi bien que celle des vallées, à la seule action de l’eau enlevant des matériaux d’un point de la surface de la terre pour aller les déposer dans un autre, creusant, dans le fond de la mer, des vallées dont elle transporte les matériaux en d’autres points, où elle édifie des montagnes. Il avait été conduit à cette hypothèse par un fait sur lequel nous aurons à revenir plus tard : la présence de restes fossiles d’animaux et de végétaux non seulement dans le fond des vallées, mais jusque sur te sommet des plus hautes montagnes[1]. Il en conclut que la mer avait dû recouvrir le globe entier et qu’elle avait créé, par le flux et le reflux de ses eaux, toutes les inégalités que nous constatons à la surface du sol.

« Nous sommes assurés, dit-il[2], par des observations exactes, réitérées et fondées sur des faits incontestables, que la partie sèche du globe que nous habitons a été longtemps sous les eaux de la mer ; par conséquent cette même terre a éprouvé pendant tout ce temps les mêmes mouvements, les mêmes changements qu’éprouvent actuellement les terres couvertes par la

  1. Ajoutons que Buffon croyait au parallélisme constant des couches de roches qui forment la surface de notre globe. Nous verrons plus bas que cette opinion est erronée.
  2. Histoire et théorie de la terre, t. Ier, p. 43.