Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome I, partie 1.pdf/124

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avec elle des jets de roche fondue qui, lancés dans l’air, retomberont en pluies de scories ou de cendres sur la contrée environnante. Enfin, l’arrivée de la lave et de l’eau, de plus en plus chauffées, à l’orifice du conduit ou du cratère du volcan, peut donner à la force d’expansion une puissance suffisante pour expulser un courant de lave massive. L’éruption terminée, survient une période de repos pendant laquelle de nouvelles provisions de calorique sortent du foyer intérieur et fondent peu à peu des masses nouvelles de roche, en même temps que l’eau de la mer ou celle de l’atmosphère descend de la surface dans les cavités inférieures ; jusqu’à ce qu’enfin, toutes les conditions requises pour une nouvelle explosion se trouvant parfaites, une autre série de phénomènes se reproduise dans un ordre tout à fait semblable. »

Credner[1], résumant l’opinion admise par tous les géologues, dit de son côté : « On doit considérer la puissance de la vapeur d’eau comme déterminante dans ces manifestations de l’activité des volcans stratifiés, et la gravité des phénomènes éruptifs d’un volcan doit être attribuée à la quantité de vapeur d’eau mise en jeu. »

Tous ces faits, toutes ces opinions ne viennent-ils pas confirmer la manière de voir de Buffon ? celui-ci n’avait-il pas raison d’écrire : « En coûterait-il autant pour couper la communication d’un volcan avec la mer voisine qu’il en a coûté pour construire les pyramides d’Égypte[2] ? »

Actions chimiques et électricité dans la production des volcans. Examinons maintenant son opinion sur le rôle des actions chimiques et de l’électricité dans la fusion des matériaux volcaniques. L’état des sciences physique et chimique était encore si rudimentaire à l’époque de Buffon qu’il ne pouvait avoir, relativement au rôle joué par l’électricité et les réactions chimiques dans la production de la chaleur du globe, que des idées purement hypothétiques, de simples « vues de l’esprit », pour me servir d’une expression qui lui était chère ; mais j’ajoute que ces vues ont été confirmées, dans une très large mesure, par les découvertes de la science moderne et le seront probablement encore davantage. La première base scientifique qui leur ait été donnée a été fournie par M. Davy. Il émit l’opinion qu’une grande quantité de métaux peuvent exister à l’état non oxydé dans l’intérieur de la terre ; que l’eau pénétrant dans le sol par les fissures des roches, et même à travers les pores dont les plus dures sont munies, et entraînant de l’oxygène, peut porter ce gaz au contact des métaux, qui s’oxydent alors en produisant une quantité de chaleur assez considérable pour déterminer la fusion des roches voisines. Si cette manière de voir était exacte, il se formerait sans cesse, dans divers endroits de la portion superficielle de la terre, des amas de substances fondues, sortes de creusets gigantesques dans lesquels il suffirait

  1. Traité de géologie et de paléontologie, p. 142.
  2. Voyez plus haut, p. 97.