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Les volcans d’après les idées modernes. J’ai insisté sur la théorie des volcans formulée par Buffon, parce qu’elle est à la fois très complète, quand on en rapproche les parties insérées dans ses Époques de la nature et dans sa Théorie de la terre, parce qu’elle soulève un certain nombre de problèmes d’une grande importance, et parce qu’elle a été adoptée, dans ses parties capitales, par un grand nombre de géologues modernes, revêtus de la plus grande autorité. Résumons cette théorie : les volcans ont un foyer en communication avec des cavités souterraines situées dans l’épaisseur des couches superficielles de la terre. Les matières en fusion que renferment les cavités inférieures et de foyer ont été « enflammées par la seule effervescence », c’est-à-dire par les actions chimiques qu’elles ont exercé les unes sur les autres, « ou par les étincelles électriques de la chaleur intérieure du globe. » Si l’on trouve de préférence les volcans dans les montagnes, c’est parce que les matières minérales y étant plus exposées à l’action de l’eau et de l’air « se mettent en fermentation et s’échauffent jusqu’au point de s’enflammer. »

Deux agents suffisent à Buffon pour expliquer la fusion des matériaux que contiennent et rejettent les volcans : les réactions chimiques et l’électricité développée par la chaleur propre du globe. L’eau et l’air, l’eau surtout, sont indispensables à la production des réactions chimiques. Les matières contenues dans les cavités volcaniques « ont besoin d’une certaine quantité d’eau pour entrer en effervescence » ; l’eau est également indispensable à la production des éruptions ; « ce n’est que par le choc d’un grand volume de feu contre un volume d’eau que peuvent se produire les violentes éruptions. » C’est cette nécessité de l’eau qui explique la présence constante des volcans au voisinage des mers.

Comparons les divers points de cette théorie avec les opinions admises actuellement et avec les faits découverts par la science moderne.

Les volcans actifs sont au voisinage des mers ou des grands lacs. En ce qui concerne la position des volcans au voisinage des mers, il est établi que sur 139 volcans qui ont eu des éruptions depuis le milieu du xviiie siècle, c’est-à-dire depuis l’époque de Buffon, 98 appartiennent à des îles ; 48 sont situés sur des continents, mais au voisinage des côtes ou de grands lacs. John Herschel a constaté que sur 225 volcans que l’on sait avoir été en éruption dans les cent cinquante dernières années, un seul, le mont Demavend, en Perse, est situé à 512 kilomètres de l’Océan, mais il est peu éloigné de la mer Caspienne. Le Jorullo, au Mexique, qui fit éruption en 1759, est situé à 192 kilomètres de l’Océan, mais il fait partie d’une chaîne de volcans dont l’extrémité touche presque à la mer. Quant aux nombreux volcans éteints qui se dressent dans des régions actuellement éloignées de la mer, comme ceux de l’Auvergne, des Montagnes Rocheuses, etc., on sait qu’à l’époque de leur activité ils étaient entourés d’océans ou de grandes mers intérieures.

La relation des cavités volcaniques avec les mers voisines, admise par