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en un point exactement correspondant à la dune dont nous parlons; enfin, sur les pentes sud-ouest de cette éminence on trouve encore des débris de moellons, pierrailles, mortiers, tuiles, provenant de l’édifice enseveli.

Creusement de la passe de Grave, formation de la pointe. — On a vu qu’à la fin du XIe siècle, Cordouan devenue île, renfermait un monastère et que de grandes tempêtes y sévissaient. La séparation d*avec la terre ferme eut lieu au Xe siècle, suivant M. Goudineau. Elle se fit sans doute peu avant l’an 1092, puisque d’une part, c’est à cette date seulement qu’est mentionnée la fuite de l’abbé de Cordouan effrayé par les tempêtes et leurs conséquences et que, d’autre part, au début du XVe siècle, l’île de Cordouan est encore assez vaste pour renfermer une chapelle et des maisons autour du phare, Baurein rapporte, en effet, que le recueil de Rymer contient une charte de Henri IV, roi d’Angleterre, datée du 8 août 1409, dans laquelle ce souverain déclare que son oncle Edouard, prince de Galles, a fait construire, à l’embouchure de la Gironde, dans le lieu le plus avancé en mer appelé Nostre Dame de Cordam, une tour et une chapelle sous l’invocation de la Vierge, avec des maisons et autres édifices et ce, afin de pourvoir à la conservation des navires qui courent de grands risques au travers des écueils et bancs de sable qui sont en cet endroit. Le roi parle ensuite de l’ermite auquel est confiée la garde de la tour et de la chapelle et de l’impôt prélevé sur les navires pour la subsistance de cet ermite. Il dit que l’impôt existe « ab antiquo tempore ». Cela tend à prouver qu’il y a toujours eu là quelque fanal ou signal pour la navigation, et vient corroborer ce que nous avons dit de l’érection de la tour par les Sarrasins.

On ne doit pas oublier d’ailleurs que les déplacements des rivages médocains n’ont pas suivi une marche continue et uniforme, mais au contraire ont progressé avec des intensités variables et sous des degrés divers. L’île de Cordouan, une fois formée, a donc dû être respectée quelque temps par la mer avant de se perdre irrémédiablement. C’est ce qui semble ressortir de l’examen des faits exposés ci-dessus et des dates respectives qui leur appartiennent.

En même temps que l’océan creusait la passe de Grave, l’atterrissement sableux de la pointe de Grave se formait et la figure de l’estuaire girondin se modifiait. Les mêmes agents physiques, qui isolaient Cordouan, emportèrent la majeure partie de l’île d’Antros avec remplacement primitif de St-Nicolas de Grave. La portion orientale de l’île fut soudée au continent et le chenal, qui l’en séparait primitivement, fermé sur ce point par l’effet des courants marins et des sables que ces courants charriaient.

Port et ville de Soulac. — Il a été dit que Soulac fut bâti au bord de la Gironde et qu’un port sur le fleuve y fut établi. C’est le