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Grave. La visite de cette fin des terres s’impose à qui veut bien connaître le littoral médocain et elle est peut-être plus agréable que toute autre pour le simple touriste. Celui qui, sortant de Talais, prend la grande route du Verdon, se trouve dans uue vaste plaine où les marais de l’ancien estuaire fluvial ont fait place à des prairies coupées de larges fossés bordés de tamarix. Les eaux de la Gironde ne s’aperçoivent plus qu’au loin, à droite, au pied des coteaux bleuissants de Saintonge. La chaîne des dunes forme à gauche un long cordon de forêt qu’interrompent les sables blancs de Grayan, puis qui reprend au-devant du voyageur par les dunes de Soulac, dont une dernière, plus haute, porte le sémaphore de Grave et vient mourir au bord du fleuve, tout contre la blanche flèche de l’église du Verdon. Passant bientôt le chenal de Talais sur un pont de pierre, jadis limite de juridiction entre le seigneur de Lesparre et le prieur de Soulac, le voyageur traverse le Jeune Soulac, né de l’invasion des dunes. La route le conduit jusqu’au pied de celles-ci, puis par un coude prononcé le mène au milieu des maisons basses du Vieux Soulac qui échappèrent tout juste aux sables dévastateurs. Laissant Soulac à gauche, il longe les dunes jusqu’au Verdon, contournant sur sa droite les prairies et les anciens marais salants de la palu de Soulac. Le Verdon, joli petit village de pêcheurs, est assis au bord d’une grande rade où de nombreux bateaux font escale. De la gare du chemin de fer un petit tramway mène rapidement à la Pointe de Grave. Il contourne l’anse sablonneuse de la Chambrette, traverse la forêt de l’État sous un ravissant tunnel de verdure et passe au pied du fort qui défend l’entrée de la Gironde.

À la Pointe sont les premiers grands travaux de défense exécutés par le service maritime. Une jetée formée de gros blocs Juxtaposés prolonge un peu en mer l’extrémité du continent. Son aspect tait songer aux constructions des Cyclopes. Les vagues s’y brisent furieusement en l’aspergeant d’écume. Par un jour de tempête, le spectacle est magnifique. En face, à 6 kilomètres, sur l’autre rive de l’estuaire girondin aux eaux trop souvent boueuses, sont rangées les riches villas de Royan et de Pontaillac, auxquelles fait suite la ligne des forêts et des dunes blanches de la Coubre. De la Pointe, redescendant au sud le long du rivage maritime, le touriste trouve 14 épis de maçonnerie qui protègent la côte des attaques de la mer. À sept kilomètres au large, il voit la blanche tour de Cordouan qu’il ne soupçonnerait pas tout d’abord posée sur un lambeau du continent. La côte est entièrement sablonneuse ; de petites dunes fort irrégulières, mal plantées de gourbets épars, arrivent jusque sur la plage en pentes abruptes que rongent les vagues. Plus loin au sud, on aperçoit à 1500m en mer une bouée qui marque l’extrémité des rochers de St -Nicolas. Ces rochers ne découvrent qu’aux basses mers d’équinoxe. Ils forment par leur ensemble une sorte de plate-forme extrêmement découpée, fissurée et crevassée, mais dont la partie su-