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ron 22 000 fr. par an pour le cantonnement de Lesparre), mais ils étaient nécessaires. L’État a fait là un sacrifice momentané, une avance de fonds, pour ainsi dire, qui sera bien compensée par les économies de l’avenir et l’utilité réelle de la nouvelle dune. Cette transformation s’imposait sur les côtes du Flamand, d’Hourtin et de Carcans, parce que les apports sableux n’ont pas cessé d’être abondants dans ces parages. Il n’en était pas ainsi sur les côtes de Soulac et de Montalivet, où la mer jusqu’à ces dernières années ne rejetait presque plus de sable. Aussi n’y a-t-on pas fait les mêmes travaux de régularisation, car ils étaient inutiles. On y a laissé la dune littorale irrégulière des débuts, se contentant d’en maintenir le gourbet à l’état serré, ce qui a suffi pour la conserver jusqu’ici.

Aliénations. — On a vu quel beau domaine forestier l’État s’était constitué dans les dunes en sauvant le pays de leur envahissement. Il ne devait pas malheureusement le conserver longtemps dans son intégrité. À peine l’avait-il établi que le gouvernement décidait de l’aliéner (Lois des 28 juillet 1860 et 13 mai 1863) sous le prétexte qu’il s’agissait de « bois dont la conservation était inutile au point de vue général, et qui pouvaient être utilement vendus, soit pour être livrés à la culture, soit pour faciliter le développement des établissements industriels ou des centres de population qui les avoisinaient. » Raisons spécieuses d’autant moins applicables aux forêts des dunes que celles-ci, l’État venait de les créer à grands frais dans l’intérêt général ! Et il les vendait comme inutiles au même point de vue ! Il est vrai que ces aliénations ayant coïncidé avec la grande hausse du prix des résines, l’État vendit cher et fil une bonne affaire. Mais ce n’était là qu’une coïncidence exceptionnelle et ces aliénations ne sont pas moins à déplorer en principe, tant au point de vue financier qu’au point de vue forestier. Elles ne pouvaient avoir de motifs rationnels que dans des cas spéciaux et pour des surfaces extrêmement restreintes, comme sur les emplacements des stations balnéaires de Soulac et d’Arcachon.

C’est en effet Soulac qui vit les premières aliénations domaniales en Médoc. Une ordonnance royale de 1839 avait concédé 2 hectares dans la forêt de Soulac, lieu-dit des Olives, au sieur Tronche de Lesparre pour l’installation d’un hôtel et d’un établissement de bains. Cette concession fut transformée en vente le 7 mai 1849, Bientôt après, une décision du Ministre des Finances, en date du 30 septembre 1854, distrayait du régime forestier 16ha 58a 84ca de terrains boisés, qui furent ensuite vendus par l’administration des Domaines en plusieurs adjudications, de 1857 à 1864, pour la somme totale de 307 026 fr. Ces terrains entouraient l’ancienne concession Tronche, le noyau de la ville actuelle de Soulac. À peu près en même temps, de 1863 à 1865, on mettait en vente la majeure partie de la forêt de Soulac, dont M. Lahens acquérait 563ha