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Attitude des populations à l’égard des travaux. — Bien que tout le monde se rendît compte, au début du siècle, de la nécessité d’arrêter les dunes, il se trouvait cependant des propriétaires et des pâtres assez jaloux de leur liberté d’allures et assez ennemis de toute intervention étrangère pour non seulement ne pas faciliter les travaux de fixation, mais encore les entraver ou même les détruire.

C’est un des nombreux exemples de cette lutte de la raison prévoyante contre l’égoïsme et l’ignorance, lutte ingrate que doivent si fréquemment soutenir les agents de l’État, et dont une large part est réservée aux forestiers avec l’Arabe incendiaire, le pâtre montagnard, ou même une municipalité à court d’argent.

Les documents de l’époque nous ont conservé des témoignages de ces différences d’attitudes des populations médocaines vis-à-vis des reboiseurs des dunes.

Les habitants de Soulac ont plus que tous autres, parce qu’ils étaient plus endommagés, demandé et favorisé la fixation des sables et assuré le gouvernement de leur reconnaissance pour ce bienfait. Dans une suite de délibérations de 1806 à 1811, le conseil municipal de Soulac expose que la commune « voit journellement son terrain envahi par des sables que les vents poussent avec violence » et demande un règlement qui défende de mener paître à moins de 60 toises (120m) de distance du pied des dunes, et d’arracher ou couper les plantes qui croissent en ces endroits (26 ventôse an ix) ; il demande « une subvention pour la charge d’un garde champêtre, afin d’empêcher les habitants de couper sur les dunes les plantes appelées gourbet » (28 février 1809), « qu’il soit fait une supplique à la Commission des dunes pour faire faire les couvertures aux frais du gouvernement » (12 mai 1809), et qu’il soit alloué « une somme suffisante pour fixer les sables errants qui vont dans l’intérieur du hameau du Verdon et menacent d’envahir le chenal de Rambaud et le port » (13 mai 1811).

Précédemment, le 5 juillet 1810, le maire de Soulac écrivait au nom de ses administrés au préfet de la Gironde : « C’est une grande satisfaction pour moi de voir une grande partie des propriétés à l’abri de l’envahissement des sables… Je pense que c’est la commune qui vous doit des remerciements et il m’est très agréable de vous prier de recevoir les expressions de sa profonde reconnaissance. Les travaux ordonnés par M. Guyet-Laprade au midi du Vieux-Soulac sont à la veille d’être terminés; les habitants ont fourni abondamment les broussailles nécessaires, et si, dans cette circonstance, il m’était permis d’émettre mon opinion, je vous demanderais de (aire continuer les travaux au nord pour achever de couvrir la chaîne des dunes qui nous menacent… J’ai parcouru un de ces jours les semis, ils offrent un coup d’œil satisfaisant ; les pins semés cette année sont d’une fraîcheur vraiment étonnante relativement aux chaleurs excessives qui ont eu lieu ; leur