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entrées à Rome, grâces à Cicéron, qui les avait arrachées à la Grèce languissante. »

Le talent que Budé avait acquis dans la langue d’Homère, le rendit en peu de temps célèbre. Christophle Longueil réclama la faveur d’en prendre des leçons. Budé lui répondit naïvement que ses occupations l’en empêchaient, mais qu’il lui procurerait un maître moins bon que lui, et que dans ses moments de loisir il s’empresserait de lui expliquer lui-même les points obscurs, et de lui interpréter les passages les plus difficiles. Longueil envisagea cette réponse comme un refus, et se prit à accuser faussement Budé de ne vouloir admettre personne dans ce genre d’étude, et d’être jaloux de ceux qui auraient pu, en suivant la même carrière, partager sa gloire et sa réputation. Il résolut de partir pour Rome, afin d’y apprendre le grec, mais dans l’espoir surtout de surpasser celui dont il avait eu à essuyer un refus qui blessait son amour-propre. Il se berçait de cette douce espérance qu’entretenait sa jalousie. Après avoir étudié cinq ans avec de bons professeurs, il écrivit à Budé une lettre en grec, croyant l’avoir surpassé. Budé prit immédiatement la plume, et lui répondit dans un style si élégant et si pur, qu’il fit d’abord l’admiration, puis le désespoir de Longueil. Découragé à la vue de l’abîme qui