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sera capable de reporter au passé ce qui n’appartient plus qu’au passé. Ainsi apparaîtra-t-elle libératrice des valeurs qui seront fécondes pour l’avancement de l’intelligence. Quiconque, sur le terrain scientifique, croirait devoir faire abstraction de ce qu’il est permis d’apprendre de nos prédécesseurs, parviendrait, sans doute, et en lui supposant du génie, à retrouver péniblement des propositions déjà connues de tous. Pour ce qui concerne la philosophie, il n’est point téméraire de prédire qu’il retomberait sur les erreurs qui se sont produites au cours des âges et qui ont été, par le progrès de la critique, dénoncées en tant qu’erreurs. Ainsi s’accroîtrait encore le danger de régression vers un nouveau moyen âge, dont l’humanité apparaît menacée après chaque secousse de la civilisation occidentale.

La méthode de recherche à laquelle conduisent les considérations précédentes est celle que nous avons suivie dans les Étapes de la philosophie mathématique. Ici comme là, nous avons multiplié les citations de façon à conserver, autant qu’il était possible, la couleur originale des époques dont nous nous efforcions de retracer la physionomie. Nous n’avons pas craint de reproduire des textes, d’ordre scientifique ou philosophique, qui assurément sont bien connus d’une catégorie de nos lecteurs, mais qui pourraient être moins familiers à une autre.

À cet égard, il y a un malentendu que nous tenons à prévenir, parce qu’il s’est produit à notre grande surprise, pour les Étapes de la philosophie mathématique. Du fait que nous nous y étions proposé de rattacher chacune des grandes doctrines philosophiques aux bases que leur fournissaient les