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LETTRE OUVERTE
Á MONSIEUR LE MINISTRE DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE
sur la
RÉFORME DE L’ORTHOGRAPHE


Monsieur le Ministre,

J’avais écrit dans mon Histoire de la langue française une phrase que, depuis quelques années, on s’est plu à citer. Je disais : « Il est possible que le hasard de la politique amène un jour au ministère un homme assez instruit pour savoir que le préjugé orthographique ne se justifie ni par la logique, ni par l’histoire, mais qu’il se fonde sur une tradition relativement récente, formée surtout d’ignorance, assez intelligent aussi pour comprendre que rien ne sera fait pour le progrès de l’enseignement primaire, tant que de si courtes années d’études devront être employées principalement à enseigner aux enfants à lire et à écrire, comme en Chine[1]. »

Le hasard m’a montré qu’il s’appelait clairvoyance, et il nous a envoyé, presque de suite, MM. Léon Bourgeois,

  1. Histoire de la Langue et de la Littérature françaises, sous la direction de Petit de Julleville, viii, 860.