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CHAPITRE II

LA CONSTRUCTION D’UNE PIÈCE

De la manière de conclure. — Des contradictions. — Des incohérences. - De l'ordre et de la gradation.

Malherbe conçoit un sonnet ou une élégie comme une unité logique qui démontre, discute, tout au moins expose quelche chose de bien déterminé. (1) Chacune de ses odes à lui a un objet précis: l'une célèbre, l'autre console, toutes vont à un but fixé d'avance.

Pindare, il est vrai, faisait autrement; mais le dessin de ses mosaïques faites d’idées, d’images, de souvenirs que le hasard seul semble avoir juxtaposés échappait aux yeux de Malherbe qui ne voyait dans ce beau désordre que «galimatias.» (2)

Aussi quand Desportes tombe dans la même faute, fait du décousu, énumère, par exemple, ses misères dans une série d’exclamations détachées, Malherbe ne s’inquiète pas de savoir s’il a voulu de la sorte imiter l’incohérence de la passion, ni même s’il y a réussi: «Son sonnet ne veut rien dire, et tous ceux qui seront composés de pièces rapportées comme cettui-ci, ne vaudront non plus que lui.» (3)

Il faut que les strophes, les quatrains et les tercets, de quelque

(1) On peut voir dans le Commentaire qu'il fait souvent un sommaire des pièces de Desportes, pour se les résumer à lui-même. El. I, 9, IV, 362; Ib. 13, IV, 369; Ib. 14, IV, 370; 15, IV, 371. etc.

(2) Rac. dans Malh. Œuv. I, LXX.

(3) Cleon. 85, IV. 349.