Page:Brunetière - Nouveaux essais sur la littérature contemporaine, 1897.djvu/149

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
139
SUR LA LITTÉRATURE CONTEMPORAINE.


cependant légitime. Pas d’impression qui ne puisse, de sa langue originelle, se transposer en une autre, et le tout est d’en trouver l’exacte équivalence.


Il est des parfums frais comme des chairs d’enfants,
Doux comme les hautbois, verts comme les prairies,
— Et d’autres corrompus, riches et triomphants,

Ayant l’expansion des choses infinies,
Comme l’ambre, le musc, le benjoin et l’encens.
Qui chantent les transports de l’esprit et des sens.


Il y a bien dans ces vers quelque chose de légèrement ridicule, mais aussi de profondément sensuel, et en tout cas d’assez original. Le symbolisme conlempurain nous est venu de là. D’autres éléments, sans doute, s’y sont joints, dont l’origine est plus intellectuelle, et, depuis Baudelaire, l’art s’est encore compliqué d’intentions ou de prétentions nouvelles. Mais c’est bien là le point de départ, et les Fleurs du mal, à défaut d’autre mérite ou d’autre intérêt littéraire, auraient celui de l’avoir indiqué.


La nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles,
L’homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l’observent avec des regards familiers.


Veut-on achever de s’en convaincre ? et veut-on, comme qui dirait, avec une preuve « expérimentale » de l’influence de Baudelaire, une explication aussi du prestige qu’il continue d’exercer ? Que l’on prenne