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qu’il appelait « le caractère asiatique » du style de M. de Balzac ? Le passage est trop joli pour que nous ne le citions pas tout entier : « J’aime du style de M. de Balzac, — écrivait Sainte-Beuve en 1850, au lendemain même de la mort du grand romancier, et avant que les professeurs de rhétorique ne s’en fussent emparés pour le confronter avec les “modèles”, — j’aime cette efflorescence (je ne sais pas trouver un autre mot) par laquelle il donne à tout le sentiment de la vie et fait frissonner la page elle-même. Mais je ne puis accepter, sous le couvert de la physiologie, l’abus continuel de cette qualité, ce style si souvent chatouilleux et dissolvant, énervé, rosé, et veiné de toutes les teintes, ce style d’une corruption délicieuse, tout asiatique, comme diraient nos maîtres, plus brisé par places et plus amolli que le corps d’un mime antique. Pétrone, au milieu des scènes qu’il décrit, ne regrette-t-il pas quelque part ce qu’il appelle oratio pudica, le style pudique, et qui ne s’abandonne pas à la fluidité de tous les mouvements ? » [Causeries du Lundi, t. II. Lundi, 2 septembre 1850.]