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HISTOIRE ET LITTÉRATURE.

qu’il nous met sous les yeux, M. Leconte de Lisle l’a vu certainement de plus près et plus fidèlement rendu, moins « littérairement », mais plus « littéralement » transcrit.

Je sais bien encore à quelles parties de l’œuvre du « magnanime prophète », comme l’appelle assez plaisamment M. Catulle Mendès, on pourrait rattacher toute cette poésie que l’on a de nos jours désignée sous le nom de poésie populaire. Ajouterai-je qu’il y a, dans les Pauvres Gens, pour ne citer que cet unique exemple, une grandeur épique où n’a jamais atteint ni n’atteindra l’auteur des Intimités et des Humbles ? Il n’est pas moins vrai, cependant, que, de ce genre populaire, — en le ramenant aux justes et modestes proportions qui lui conviennent, baissant le ton et ainsi l’approchant de la réalité, s’attachant d’ailleurs à l’exacte et scrupuleuse observation du détail, — M. François Coppée s’est fait un genre original et nouveau. Si c’est moins « poétique » peut-être, c’est plus réel, plus observé, comme nous disons, et plus vécu.

Mais, de tous les parnassiens, ou du moins de tous ceux que M. Catulle Mendès revendique pour l’honneur de « l’école » ou du « groupe », celui qui, jusqu’à ce jour, tout en acceptant la discipline commune, a le mieux su réserver sa personnalité, c’est M. Sully Prudhomme. Il n’est pas ici question de juger son œuvre, mais seulement d’en indiquer l’un des caractères essentiels. M. Sully Prudhomme est un poète philosophe, et le seul qui, dans ce temps, ait vrai-