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LE PARNASSE CONTEMPORAIN.

ment M. Théodore de Banville quand il donnait aux jeunes poètes ce conseil étrange à coup sûr, dans la forme, de lire « le plus qu’il leur serait possible des dictionnaires, des encyclopédies, des ouvrages techniques traitant de tous les métiers et de toutes les sciences possibles » ; et j’en ai connu, pour ma part, — je parle sérieusement, — qui suivaient ce conseil à la lettre. Mais ce que l’on ne saurait trouver ni dans les « encyclopédies », ni dans les « dictionnaires », ni dans un « Traité de la condition des soies » ou dans un « Manuel du fabricant de papiers peints » ; à savoir l’exacte notion des choses et l’acceptation vraie des mots, d’autres poètes, vers le même temps, obéissant à la même secrète influence, les cherchaient où on les trouve, dans la science même, dans la vie, dans la nature.

On a justement critiqué, chez les parnassiens, un insupportable abus de la description pittoresque, et nos successeurs l’y critiqueront probablement comme nous. Il faut bien avouer, cependant, qu’ils ont eu, parmi cette débauche de couleurs, un sentiment de la nature beaucoup plus vif, plus direct et plus franc que les romantiques. Les exemples en abonderaient dans l’œuvre de M. Leconte de Lisle. J’en connais les faiblesses et j’en ai indiqué les affectations. Mais enfin, quelque distance qu’il y ait entre le disciple et le maître, entre le poète des Poèmes antiques et des Poèmes barbares et celui des Contemplations ou de la Légende des siècles, s’il le voit de moins haut, ce