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HISTOIRE ET LITTÉRATURE.

être, ce jour-là, qu’il ne voulût, selon sa coutume, « faire poser » le naïf disciple, et traiter M. Léon Cladel comme « un simple bourgeois ». Car on se représente malaisément un bon jeune homme convenant qu’une préposition qu’on lui montre a effectivement « le doux éclat des étoiles aurorales », et reconnaissant dans une conjonction le scintillement des « crinières inextricables des comètes ».

Mais, de toutes les théories affichées par les parnassiens, celle que que l’on a le plus vivement attaquée, c’est leur théorie de la rime, telle qu’on la trouve habilement exposée dans le Petit traité de poésie française de M. Théodore de Banville. Dirai-je que c’est, au contraire, celle que je trouve le plus aisément défendable, et, malgré quelques exagérations ou quelques affectations, de beaucoup la plus voisine de la vérité vraie ?

Grâce, en effet, à ces négligences dont Lamartine et Musset eux-mêmes n’avaient pas craint de donner l’exemple, et grâce à l’autorité de quelques prosateurs qui, sans doute, ne s’étaient jamais enquis de ce que c’est qu’un vers français, une étrange opinion s’était accréditée, dont on pourrait, en cherchant bien, retrouver encore plus d’une trace. On professait donc que la rime, dans notre langue, constituait une gêne pour le poète, qu’il était permis par conséquent d’en user familièrement avec elle, et, faute enfin de pouvoir absolument s’en passer, prendre toutes les licences qu’exigeraient le sens ou la raison. N’avait-on pas même inventé