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HISTOIRE ET LITTÉRATURE.

qu’il ne corrigera plus. Mais, puisqu’il y avait une idée sous ce titre qu’il avait choisi, servons-nous de son Dictionnaire comme d’un prétexte encore plus que comme d’une occasion, et tâchons d’en dégager ce qu’on nous permettra d’appeler, — quoique ambitieusement — la théorie du lieu commun. On verra, si nous ne nous trompons, qu’elle touche à plus de points, et plus intéressants, de la philosophie de l’art, que l’on ne serait tenté de le croire.

Qu’est-ce d’abord qu’un lieu commun ? Est-ce de ces phrases, périphrases, métaphores, ou aphorismes tout faits, stéréotypés, pour ainsi dire, qui circulent dans le courant de la conversation quotidienne, qui viennent se placer d’eux-mêmes sur les lèvres de l’avocat ou s’offrir à la plume du journaliste, et qui rentrent enfin tout naturellement sous la définition juridique de ces choses communes, dont tout le monde peut jouir, sans que personne ait le droit d’en revendiquer la propriété ? Prenons de ça, de là, quelques exemples au hasard. Appeler Bossuet « l’aigle de Meaux », ou Fénelon « le cygne de Cambrai, » comme peut-être quelques vieux professeurs de rhétorique ont encore aujourd’hui le courage de le faire, est-ce donner dans le lieu commun ? Inviter un jury, comme le font et le feront longtemps encore nos avocats généraux ou procureurs de la république, à ne pas « permettre que le coupable échappe à la vindicte des lois ? » ou encore, comme nos prédicateurs le feront aussi longtemps que durera la religion, invoquer « sur la tête