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de m. ferdinand brunetière.

ques-uns d’entre eux la licence de tout faire ? Mais pour être sincère, j’ajouterais avec le fabuliste que la langue est aussi « la mère de tous les débats, la nourrice des procès, la source des divisions et des guerres. Si l’on dit qu’elle est l’organe de la vérité, c’est aussi celui de l’erreur et, qui pis est, de la calomnie : par elle on détruit les villes, on persuade de méchantes choses… » Et nos journalistes, qui ont bien plus d’esprit que Xanthus, ne s’en fâcheraient sans doute point : je ne me ferais pas une affaire avec eux pour cela ! Ils me remercieraient encore, bien loin de m’en garder rancune, si je regrettais avec eux ce qu’ils dépensent quotidiennement, ce qu’ils dissipent, ce qu’ils gaspillent de verve, d’esprit, de talent inutiles. Combien de poètes, et d’auteurs dramatiques, et de romanciers, la presse, depuis cinquante ans, n’a-t-elle pas dévorés !