ou même seulement deux, et quelquefois un seul. Leur prix s’élève plus ou moins, en raison de ces degrés de rareté. Toutefois, on ne saurait trop le faire remarquer, plusieurs de ces éditions, et en particulier les éditions princeps des classiques anciens, ont un mérite bien plus réel que celui de la rareté : elles reproduisent exactement le texte des vieux manuscrits actuellement perdus, ou tout au moins égarés, et elles offrent ainsi des secours précieux aux savants qui cherchent à établir de bons textes de ces mêmes auteurs. Malgré un avantage aussi généralement reconnu, ces glorieux témoignages de l’érudition du xve siècle sont beaucoup moins recherchés maintenant qu’ils ne l’étaient encore il y a une cinquantaine d’années. L’Angleterre, jadis si empressée de les posséder, l’Angleterre elle-même semble les abandonner ; et quant à nous, engoués que nous sommes de curiosités infimes et trop souvent dénuées d’un véritable intérêt, nous rejetons ces utiles et précieux monuments d’un âge pour lequel, cependant, nous professons une sorte de culte. Au surplus, pour que ces livres rares reprissent une grande valeur, il suffirait que deux riches bibliophiles voulussent en former la collection ; ce qui, à la vérité, serait fort difficile, et peut-être même impossible à exécuter, parce qu’une partie de ces anciennes éditions-là n’existe plus que dans des bibliothèques publiques, ou dans deux ou trois cabinets étrangers qui sont sous le régime des substitutions. D’ailleurs, on le sait, il y a des livres de ce genre qui, comme par exempte les éditions de Guillaume Caxton, le plus ancien imprimeur anglais, ont été de tout temps presque introuvables hors du pays qui les a produits
Les livres imprimés sur vélin appartiennent de droit à la classe des livres rares, puisque le tirage en est toujours limité à un très-petit nombre d’exemplaires, et le plus souvent à un seul. Une partie des beaux volumes dont nous parlons, et ce sont les plus précieux, ont leur place dans la série du xve siècle, car ce genre d’impression, aussi somptueux qu’il est dispendieux, a été fort usité au premier âge de la typographie, particulièrement à Mayence et à Venise. Qui ne connaît, d’ailleurs, les magnifiques vélins que produisirent, un peu plus tard, les presses parisiennes, auxiliaires de l’active industrie de notre célèbre Antoine Verard ? De pareils livres, et surtout ceux que décorent de belles et nombreuses miniatures, font et feront toujours, après les manuscrits anciens, le plus bel ornement d’une bibliothèque. Or en ce genre, aucune, on peut le dire, n’est plus riche que la Bibliothèque impériale de Paris. Dans l’admirable collection qui s’y trouve réunie, et que notre excellent ami Joseph Van Praet a si bien décrite, dans un beau Catalogue imprimé à ses frais, on peut remarquer qu’à compter de la seconde moitié du xvie siècle jusque vers le commencement du siècle dernier, très-rarement le vélin a été employé à l’impression des livres ; et que même ce n’est guère qu’à la fin du xviiie siècle que l’usage a commencé à en redevenir fréquent. Depuis cette époque jusqu’à nos jours, bien peu de livres de luxe ont paru, soit en France, soit à l’étranger, dont il n’ait été tiré sur vélin au moins un exemplaire : ce qui a rendu beaucoup trop communes ces sortes de curiosités d’un usage assez incommode, et en a réduit si sensiblement le prix, qu’aujourd’hui on trouverait difficilement un libraire qui voulût avancer 10 fr. par feuille pour un tirage de ce genre.
Après les livres imprimés sur vélin viennent les tirages sur grand papier et sur des papiers de couleur. Ce sont là des curiosités du second ordre ; dont le prix, ordinairement subordonné au mérite plus ou moins réel des éditions et au nombre des exemplaires tirés, peut cependant, en