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DE PHILIPPE

s’asseyant, se promenant encore et faisant pleurer la fille, en lui décrivant son père sur son lit de mort…

— Comme vous devez avoir de la peine.

Alors, il se montrait cynique, et la fille, avec une moue de dégoût :

— Vous avez pas honte !

Philippe qui ne cessait de boire, aurait bien voulu s’étendre là, et dormir longtemps, mais il songeait à sa cousine, et, sans cesse, il se disait : « Il faut que je sois là pour la mort de mon père. Je n’ai jamais vu mourir. »

Enfin, il partit. Il se reprochait de n’avoir pas commis le sacrilège qu’il s’était proposé, et il se sentait diminué, humilié. Et il avait encore le goût de parler, ce qui le conduisit au journal où Pierre, son ami, était reporter, et tous deux ils rédigèrent une notice emphatique sur le mort. « S’il ne mourait pas ! » se disait Philippe, mais il cessait de se troubler : « Pierre a bien vu que j’étais au-dessus de tous ces sentiments. »

Il était à peine revenu que son père, qui baissait, ouvrit une large bouche et les yeux chavirés, passa.

La tante Bertha, les yeux secs et tremblants, se jeta dans les bras de Philippe :

— C’est toi mon seul cousin, à cette heure.

Le lendemain des funérailles, la tante Bertha aurait voulu l’oublier : Philippe laissait son patron, sous le prétexte de « faire de la litté-