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DE PHILIPPE

son et toute sa duplicité. Cependant une voix s’excusait en lui : il n’était pas sincère, lorsque, pour flatter Pageau et d’autres, il louait, avec les réticences et le manque d’abandon de Philippe, le « grand homme », il n’était pas sincère, et on aurait dû s’en apercevoir : ainsi sa volte-face actuelle ne serait plus une volte-face. Avoir menti jadis absolvait aujourd’hui. Et c’est Claire qui était responsable, il avait voulu plaire aux amis de Claire. Mais c’est à ce Pageau qu’il en voulait, Pageau qu’il voulait voir, justement parce que Philippe ne pouvait s’empêcher d’aimer ceux à qui il en voulait.

Tout à coup Philippe s’aperçoit qu’il est maintenant catholique, qu’il n’a pas le droit d’abandonner Dieu maintenant, et, du bout des lèvres, il dit : « Mon Dieu, je vous offre ça. » Naïvement, il sent qu’il ne sent rien. Mais Philippe a maintenant assez d’expérience pour se rappeler : je ne sens pas ma volonté, et c’est en ce moment qu’elle est le plus volontaire : « Mon Dieu, prenez-moi comme je suis, faites ce que vous voudrez de moi. » Et, se traitant d’hypocrite, le sourire presque aux lèvres, Philippe pria pour Pageau : « Mon Dieu, je prie votre Miséricorde de faire d’une prière d’hypocrite une prière sincère. »

Queue basse, Philippe entra dans l’antichambre. Le sourire de la « garde » le remonta : elle le reconnaissait, et c’était un sourire plus amical que complice. Lorsque Philippe allait